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Compte-rendu critique – Le Voile de Pythagore. Du son à l’objet

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Professeur agrégé à l’Université Paris-Saclay, Docteur en littérature britannique et consultant en langue anglaise, Stéphane Sitayeb est l’auteur d’une monographie sur Arthur Machen (Sacré et sacrilège chez Arthur Machen : pour une poétique de la prose aux XIXe et XXe sièclesL’Harmattan, 2022) et de quatre ouvrages pédagogiques pour le Supérieur (Ellipses, 2022–2023). Son enseignement polyvalent à l’université Paris-Saclay (culture anglophone, histoire des idées, traduction et grammaire) reflète son double cursus de chercheur, étant rattaché aussi bien aux axes littéraires de VALE (Sorbonne Université) qu’aux perspectives transdisciplinaires de SLAM (Univ. Paris-Saclay). Ses recherches privilégient désormais les perspectives inter- et transdisciplinaires où dialoguent textes, cultures et sociétés.

Pauline Nadrigny, Le Voile de Pythagore. Du son à l’objet, Classiques Garnier, 2021, p. 400

L’ouvrage est disponible ici.

Résumé Le Voile de Pythagore. Du son à l’objet de Pauline Nadrigny se consacre à l’étude interdisciplinaire de la notion d’« objet sonore » telle qu’elle a été théorisée par Pierre Schaeffer, fondateur du Groupe de Recherche Musicale et père de la musique concrète. Puisant dans un corpus aussi bien musical que philosophique, l’auteure ancre son étude dans la phénoménologie et souligne l’importance de la Gestalt et du structuralisme dans la cognition comme dans la réception du phénomène sonore. Cet ouvrage combine les expérimentations électroacoustiques des musiciens et théoriciens de la musique concrète à la culture d’une pensée philosophique « s’intéress[ant] à la consistance d’une expérience perceptive » (p. 133) et qui, partant, se veut partisane d’une « approche phénoménologique de l’expérience sonore » (p. 136).

Mots-clefs : Musique, Gestalt, perception, phénoménologie, Schaeffer.

AbstractLe Voile de Pythagore. Du son à l’objet (The Pythagorean Veil. From sound to object) by Pauline Nadrigny consists of an interdisciplinary study of the notion of « sound object » as it was theorized by Pierre Schaeffer, founder of the Groupe de Recherche Musicale and father of musique concrète. Drawing from musical as well as philosophical corpora, the author anchors her research in phenomenology and highlights the importance of Gestalt and structuralism in the cognition and the reception of sound phenomena. In this work, the author combines the electroacoustic experiments of the musicians and theorists of musique concrète with the culture of a philosophical thought « interested in the consistency of a perceptive experience » (p. 133) and therefore advocates for a « phenomenological approach of the sound experience » (p. 136).

Keywords: Music, Gestalt, perception, phenomenology, Schaeffer.

 


Acousmatique – Nom donné aux disciples de Pythagore qui, pendant cinq années, écoutaient ses leçons cachés derrière un rideau, sans le voir, et en observant le silence le plus rigoureux[1].

Situé à la croisée de l’expérimentation et de la philosophie de la perception, Le Voile de Pythagore. Du son à l’objet de Pauline Nadrigny étudie les conséquences esthétiques de l’enregistrement musical tout en analysant la notion d’« objet sonore » telle qu’elle a été théorisée par Pierre Schaeffer (1910–1995), fondateur du Groupe de Recherche Musicale et du courant éphémère portant le nom de musique concrète. L’auteure combine les expérimentations électroacoustiques des musiciens et théoriciens de la musique concrète à la culture d’une pensée philosophique « s’intéress[ant] à la consistance d’une expérience perceptive » (p. 133) et qui, partant, se veut partisane d’une « approche phénoménologique de l’expérience sonore » (p. 136), comme elle le précise :

Une partie importante de cet ouvrage sera consacrée à l’analyse de la relation que Schaeffer entretient avec les concepts de la phénoménologie, notamment husserlienne comme de la Gestalttheorie, voire du structuralisme. (p. 45)

Fondé sur une étude du mythe d’Echo, l’Avant-Propos pose le concept d’objet sonore comme un phénomène qui « surgit dans un contexte qui délie ce dernier de sa source et de ce qui lui assigne un sens et une valeur » (p. 25), situation aporétique invitant à une prise de conscience du rôle fondamental de l’enregistrement et de l’écoute. Mythe acousmatique, l’histoire d’Echo incarne bien la ductilité du son enregistré, son existence problématique et son devenir esthétique :

Le mythe d’Echo permet en effet de poser un certain nombre de questions liées à la situation acousmatique : quel est le statut phénoménologique de l’objet sonore, dans la mesure où il n’est ni identifiable à sa source, ni réductible à une simple copie de son initial qui a été fixé ? Est-il possible de penser ce phénomène qu’est le son autrement que comme un simple simulacre et de lui donner une consistance formelle propre. (p. 21)

Dans son analyse de la démarche musicale et de la réception sonore, l’ouvrage de Pauline Nadrigny a ceci de remarquable qu’il se réclame de deux attitudes antagonistes mais complémentaires : l’abstrait et le concret. Son ouvrage fait alors la part belle à la théorie philosophique comme à la dimension technique et expérimentale de la musique concrète et de la composition.

Introduction de l’ouvrage

Négligeant le projet bruitiste, Schaeffer cherche moins à faire pénétrer le bruit dans la musique qu’à repartir du phénomène sonore pour renouveler les valeurs musicales. (p. 39)

Dans son « Introduction », Pauline Nadrigny corrèle la complexité épistémologique émanant des études sur l’objet sonore à la nature « inréifiable » (p. 26) du son, par opposition à l’objet visuel qui, lui, s’offre à la perception de manière plus intelligible : « l’audible déchoit au rang d’indice, tandis que le visible s’élève au rang d’objet »[2], conclut Claude Bailblé. Comme en atteste le recours nécessaire au visuel dans l’étude du phénomène sonore (solfège et notations diverses), le son se définit avant tout par son essence insaisissable et éphémère, ce qui légitime la volonté de fixation animant tout enregistrement. Qu’il soit radiophonique ou réalisé en studio, l’enregistrement est destiné à rendre itérable et multiple un phénomène censé être hapaxique et relever de l’unicité. En sus des progrès techniques, ce sont les études sur le concept d’écoute « qui ont permis de donner au bruit une lisibilité nouvelle [tout en donnant naissance] à une pensée de l’écoute originale » (p. 35). Harmonieusement équilibré, le corpus musical et philosophique retenu par l’auteure se concentre notamment, bien que non exclusivement, sur la musique concrète des années 1940 aux années 1970, avec comme principaux compositeurs et théoriciens Pierre Schaeffer, dont le magnum opus, le Traité des objets musicaux (1966) lui valut une renommée en matière d’acousmatique et de musique électroacoustique, ou encore Olivier Messiaen, Karlheinz Stockhausen et François Bayle. Pauline Nadrigny ne se limite néanmoins pas à cette seule veine théorique et emprunte volontiers une approche comparatiste permettant de mettre en perspective, voire en tension, la pensée de Pierre Schaeffer, pierre angulaire de l’ouvrage, aux nuances et aux critiques formulées par des penseurs tantôt existentialistes tels que Jean-Paul Sartre[3], tantôt poststructuralistes comme Deleuze et Guattari. L’héritage de la pensée phénoménologique, de Merleau-Ponty à Husserl, étant crucial pour le projet schaefferien, Pauline Nadrigny reste sensible à l’historicité de la perception de l’objet sonore, tout au long de son ouvrage. Empruntées à une élégie du poète autrichien Rainer Maria Rilke (1875-1926), les notions de « scriptible / indescriptible »[4] guident P. Nadrigny dans l’analyse du paradoxe selon lequel « la perception de la musique a […] toujours ceci de paradoxal qu’elle semble nous faire apprécier les sons par là même où elle les ampute de leur plénitude » (p. 31). À travers sa définition de l’objet sonore comme « une perception globale qui se donne comme identique à travers différentes écoutes ; un ensemble organisé »[5], Pierre Schaeffer vise une Gestalt résistant à la multiplicité des écoutes. Après avoir souligné la nécessité de conserver un solfège, nommément, une description systématique, et ce, malgré ses limites, car celui-ci demeure le meilleur moyen de « fixer l’indescriptible » (p. 32), Pauline Nadrigny détermine « quelle attitude, quel type d’attention perceptive est nécessaire pour faire surgir un tel phénomène invariant » (p. 34) et conçoit l’enregistrement comme une traduction, ce qui lui permet, dès lors, d’éluder la dialectique du scriptible et de l’indescriptible. S’inscrivant dans un débat philosophique qui suppose une double approche, aussi bien esthétique et expérimentale que philosophique et théorique, l’angle retenu par l’auteure est ainsi interdisciplinaire. Ce faisant, elle répond au débat opposant les partisans d’une écoute ordinaire et naturelle de la musique (le live) aux amateurs de musique modifiée par l’enregistrement en studio, sans toutefois mentionner les techniques post-schaefferiennes plus connues aujourd’hui telles que la voix corrigée (Auto-Tune). Pauline Nadrigny entend renouveler l’expérience perceptive de l’auditeur en démontrant que l’héritage fondamental des théories schaefferiennes sur l’acousmatique sont étayées, de surcroît, par une approche phénoménologique :

[…] quelle place tient la philosophie dans la recherche interdisciplinaire et, dès lors, dans la constitution de l’objet sonore. Nous devons en effet nous interroger sur le statut de ses références : s’agit-il d’emprunts ponctuels, ou d’une influence plus profonde ? Schaeffer puise-t-il dans les textes philosophiques comme dans un répertoire de concepts ? Accède-t-il par là à un contenu, fait de notion et de thèses ? Ou est-il à la recherche d’une méthode ? […] Cet ouvrage peut ainsi se lire comme une étude de l’imaginaire d’une théorie musicale. (p. 51)

I – Expérience sonore et transformations : les miracles de l’enregistrement

Intitulée « La coquille », la première partie s’attache à définir et à réhabiliter l’importance de la réification sonore à travers des notions d’acousmatique et d’acoulogie telles que la « dynema »[6] ou à travers les multiples praxis transformatives en studio, lieu que l’auteure baptise « chambre des merveilles » (p. 93). Plus volumineuse que les autres du fait de sa nature introductive, cette partie aborde une question essentielle et surtout d’actualité : le rapport du compositeur et de l’entendeur – respectivement émetteur et récepteur de l’objet sonore – à la composition et à l’écoute.

Née d’un besoin de percevoir le son non plus comme un artéfact purement physique (principe de l’acoustique) mais également comme une structure musicale complexe, l’« acoulogie »[7], néologisme de Pierre Schaeffer, a permis d’enrichir et de renouveler notre appréhension du phénomène sonore. L’acoulogie consiste en la discipline consacrée à l’étude des sons, et ce, sous toutes leurs formes, ce qui inclut les paramètres et conditions de toute écoute ainsi que les sensations de l’entendeur. À l’inverse de l’acoustique et de la psycho-acoustique, l’acoulogie « s’intéresse aux formes actuellement perçues » (p. 135). Ainsi, les manipulations en studio, à titre d’exemple, « invitent le chercheur à passer du plan physique au plan phénoménologique de l’expérience » (p. 136). À ce stade, la mention des logiciels de composition musicale contemporains permettrait d’étayer les arguments de l’auteure tout en démontrant l’importance de l’acoulogie au 21e siècle. On songe notamment au perfectionnement d’une technique plus globale à notre époque, celle du mastering, permettant de modifier l’ensemble des pistes sonores composant une musique. Au croisement de ces dynamiques figure néanmoins la corrélation établie par Pierre Schaeffer, dans Esthétique et technique des arts-relais (1941–1942), entre radio et cinéma. Ces deux arts ont une matière limitée (la pellicule comme le disque microsillon) devant être sublimée par les nouveaux outils techniques, lesquels offrent, notamment à l’auteur de radio, la possibilité de défier les lois de la nature en matière d’acoustique tout en passant d’une forme d’écoute abstraite à une écoute concrète. Pierre Schaeffer emploie les néologismes « dynamophones » et « dynema » en tant qu’équivalents sonores du cinématographe et du cinéma : bande-son et bandes images sont, partant, perçues comme identiques et légitiment l’attention portée par Schaeffer au montage radiophonique plutôt qu’au direct. La série de transformations affectant l’ensemble de la chaîne technique, de la captation à la réception d’un son (modulation, enregistrement, mixage, diffusion), deviennent la nouvelle materia musica du musicien-ingénieur. Tandis que la radio et le cinéma doivent se libérer des contraintes de fidélité régissant le champ de la mimèsis, le réinvestissement (voire la musicalisation) du bruit est vital. Dans son étude des conséquences de la radiodiffusion, l’auteure propose une véritable étude du sujet qui écoute, s’engageant à « étudier l’oreille de l’auditeur de la même manière que Paul Valéry inspectait le petit coquillage ramassé sur le sable » (p. 78).

S’engageant volontiers sur un terrain plus technique, à travers l’expérience de la « cloche coupée »[8] de Pierre Schaeffer, par exemple, Pauline Nadrigny montre que les manipulations électroacoustiques (fermeture du sillon, coupure de la cloche et le passage du son à l’envers) sont certes hasardeuses mais déconditionnent le son de son contexte causal ou contextuel tout en créant les conditions d’une écoute plus qualifiée. L’objet sonore ne se comprend que dans la corrélation avec un sujet engagé dans une constante liaison du faire et de l’entendre » (p. 118). Citant notamment André Abraham Moles[9] et sa volonté de remédier à nos lacunes face à la nature insaisissable du son, l’auteure envisage les concrétisations sonores possibles par la médiation de l’enregistrement et, à ce titre, démontre l’impact des nouvelles techniques de mixage en studio afin de mettre en lumière les diverses temporalités et spatialités affectant le phénomène sonore autant que l’écoute. Par opposition à une écoute ordinaire, l’« écoute réduite », phénomène et concept schaefferien désignant une démarche antinaturelle et allant à l’encontre de tous les conditionnements, fait l’objet d’une première définition à ce stade de l’ouvrage. Inspiré d’Husserl dans sa tendance à pratiquer une épochè de l’écoute afin d’être ouvert aux champs des interprétations possibles lors du phénomène de perception, Schaeffer divise (division qui a valeur de « réduction ») l’appréhension de l’objet sonore en sept critères : la masse, la dynamique, le timbre harmonique, le profil mélodique, le profil de grain et l’allure. L’écoute réduite est principalement illustrée par le procédé technique du « sillon fermé » et par l’expérience de la cloche coupée – un son de cloche dont il est aisé, en studio, de supprimer l’attaque pour transformer ce son initialement frappé en un son alors flûté. Ces techniques sonores transformatives légitiment l’intérêt de cultiver une « pluralité de l’écoute », laquelle « décontextualise l’objet sonore de son arrière-plan anecdotique, symbolique ou musical » (p. 118).

Fondant son analyse sur des études concrètes, en particulier K. Stockhausen, l’auteure rappelle qu’en quittant l’empirie intuitive, le musicien se heurte à un problème de classification des sons inouïs et doit repenser, « face à la complexité des phénomènes sonores que nous livre l’enregistrement […], les gestes compositionnels eux-mêmes » (p. 143). Opposant la méthode synthétique que Shaeffer emprunte à la Gestalt (supposant une étude des structures complexes du musical) à l’approche analytique de Stockhausen qui souhaite « décomposer l’objet sonore pour le construire selon la structure choisie par le compositeur » (p. 147), l’auteure aborde, par la suite, des notions de solfège concret. Est notamment proposée une illustration des trois plans (rythmique, mélodique et harmonique) que dégage Pierre Schaeffer lorsqu’il établit son premier solfège concret[10]. Ces pages montrent la manière dont ces premières techniques ont renouvelé l’appréhension de la sonorité. Si le thème de l’expérience est si prégnant dans Le Voile de Pythagore, c’est notamment du fait de la tension opposant « deux sens de l’expérience chez Schaeffer : un sens expérimental qui renvoie aux conditions du studio et de ses recherches […] et un sens expérientiel informé par le retour aux choses mêmes inspiré par la phénoménologie » (p. 168). Une fois les liens entre objet sonore et phénoménologie établis, l’auteure peut ainsi aborder la question en convoquant la Gestalttheorie. 

II – Acoulogie et Gestalttheorie : l’objet sonore comme fantôme

Intitulée « Acoulogie », la deuxième partie du Voile de Pythagore se consacre A) aux fonctions et B) à la phénoménologie de l’écoute. C’est alors que s’engage un « questionnement épistémologique : celui du rôle d’une théorie philosophique de la perception au sein d’une théorie musicale » (p. 169). S’attachant principalement à étudier la phénoménologie et la théorie de la forme à travers la notion d’acoulogie, l’auteure dégage une « éthique de l’auditeur » (p. 177) en proposant une étude de sa configuration subjective et de sa manière d’appréhender le son.

Dans un premier temps (« Fonctions d’écoute »), l’auteure définit l’acoulogie avant tout comme « l’étude des corrélations possibles entre l’écoute et son objet » (p. 179), se rapprochant davantage encore de la philosophie de la perception dans ses interrogations sur « l’intention d’entendre » (p. 180). Relatant les quatre fonctions d’écoute telles que définies par Pierre Schaeffer (« écouter, ouïr, entendre, comprendre »[11]), cette partie prend soin d’opérer une distinction sémantique entre ces différents gestes d’écoute et d’évoquer diverses pratiques liées au mixage. L’étude de l’écoute réduite schaefferienne ainsi que l’analyse de phénomènes situés à la croisée de l’ouïr et de l’entendre, tels que l’état hypnagogique, permettent enfin à l’auteure de fournir une définition plus complète de l’objet sonore, perçu, dès lors, comme se situant « à la rencontre d’une action acoustique et d’une intention d’écoute » (p. 204). Loin de supprimer l’écoute naturelle, le principe de réduction proposé par Schaeffer réoriente l’écoute sur l’objet sonore et suscite une action paradoxale visant davantage à se rendre disponible à l’objet qu’à le produire. L’appartenance d’un concept de Paul Valéry, l’« esthésique », au champ de la réception sensible étant soulignée, Pauline Nadrigny précise que les descriptions propres à cette notion renvoient, elles aussi, à « l’observation d’une vie intime de la conscience perceptive » (p. 207).

Dans un second temps (« Faire de la phénoménologie sans le savoir »), Pauline Nadrigny reconnaît à la Gestalttheorie une valeur singulière en ce qu’elle reste la pensée la plus à même de donner ses principes à l’expérience musicale – d’où la dimension épistémologique des recherches de Schaeffer. Après une étude des liens entre les recherches de Schaeffer et les penseurs de la phénoménologie des 19e et 20e siècles, en particulier Husserl[12] et Merleau-Ponty[13], que Pierre Schaeffer lisait et dont il s’inspira, Pauline Nadrigny relève, de surcroît, l’apport des études de Sophie Brunet[14] dans l’évolution du Traité. Figure féminine au cœur de la pensée schaefferienne, Sophie Brunet a signalé l’incompatibilité entre l’objet husserlien et l’écoute : « de là vient la distinction explicite entre situation acousmatique et écoute réduite, que Brunet invite à ne pas confondre, et cette césure que beaucoup de commentateurs repèrent dans la pensée de Schaeffer » (p. 218). À ce titre, P. Nadrigny opère une distinction entre les théories schaefferiennes et, a contrario, la pensée de Jean Molino, laquelle sous-tend que l’écoute réduite est « aux antipodes de la démarche phénoménologique » (p. 225). La modélisation de l’objet sonore établie par Pierre Schaeffer (livre IV du Traité des objets musicaux) se construit autour de trois thèmes phénoménologiques cardinaux et Pauline Nadrigny se consacre plus éminemment au troisième, nommément, le geste de l’épochê, qui trouve dans l’écoute réduite une application musicale.

La différence introduite par l’enregistrement justifie le recours à d’autres pages du corpus husserlien ainsi que l’étude de la technique du sillon fermé, qui permet de rejouer de manière méthodique le processus de la constitution de l’objet, mais, cette fois, en le contrôlant, et de révéler l’identité de l’objet. L’auteure part ensuite en quête d’une « archéologie de l’écoute » (p. 226) avec, en guise de référence principale, Carl Stumpf, auteur de la Tonpsychologie (1883-1890) – titre signalant bien la volonté de l’auteur de « décrire les fonctions psychologiques par lesquelles la tonalité est suggérée »[15], tout en mettant l’accent sur la dimension fonctionnelle de la conscience. C’est une notion husserlienne essentielle, celle du « fantôme » (Dingphantom, « mixte d’objectivité et d’abstraction, de présence et d’absence, d’existence et de flottement », p. 229) qui est ici convoquée pour dépeindre l’objet sonore comme un :

[…] objet intentionnel, plus particulièrement délié de son contexte et visé pour ses proportions internes. La réduction eidétique ne supprime pas la cause et le contexte de l’objet comme visée, selon la croyance en l’existence de l’objet. […] Il ne s’agit donc pas de donner un corps à Echo, mais, comme la déesse Gê chez Longus, de jouer de sa ductilité. (p. 229-231)

Dans une volonté de retour au concret, et exploitant la référence commune de ces deux artistes pour la phénoménologie husserlienne, l’auteure établit un parallèle entre Francis Ponge et Pierre Schaeffer, en qui elle perçoit une « communauté de référence et de méthode, une certaine affinité des imaginaires » (p. 235). Si le parallèle est convaincant, la mention des instrumentistes du 19e siècle tels que René Ghil et Stuart Merrill pourrait fournir ici un point d’ancrage pertinent quant à la manière dont l’écriture poétique, bien qu’ancrée dans le graphique, reste un phénomène tout autant sonore et, par ailleurs, issu de l’oralité. Stuart Merrill, membre du groupe instrumentiste de René Ghil, développe une harmonie imitative particulièrement musicale du fait de ses origines anglophones, recourant notamment aux principes, aux timbres et aux rythmes (iambiques, trochaïques, etc.) de la métrique anglophone afin de transformer le langage poétique français et d’aboutir à une véritable poésie-musique. A cette époque fin-de-siècle plus particulièrement encore, les théories de Richard Wagner, illustrées dans ses livrets, coïncident avec les exigences esthétiques des symbolistes, qui mettent en application, dans la poésie en prose, l’idée d’une synthèse des arts, d’un Art total, qui serait un syncrétisme de divers genres et de multiples formes.

III – Modéliser le son : le(s) solfège(s)

Dans sa troisième partie, « Solfège », qu’elle emploie à juste titre sous sa forme pluralisée pour en indiquer la nature protéenne et polymorphe, Pauline Nadrigny A) étudie le passage de Pierre Schaeffer de la Gestalt au structuralisme pour tenter de s’interroger sur la justesse des modes de structuration musicale. Elle se concentre ensuite sur B) la distinction entre objet sonore et objet musical pour enfin étudier C) le matériau sonore et son historicité.

Le désir, formulé par Schaeffer, de « déphasage » (p. 238) entre les plans poétique et esthésique à travers une étude du matériau sonore perçu donne lieu à une réflexion plus précise sur le solfège, qui devient, dès lors, un « exercice spirituel par lequel l’homme en se mesurant aux objets et à leur agencement progresse dans la connaissance qu’il a de lui-même » (p. 238). Soutenant que « l’acoulogie invite à s’entendre entendre » (p. 243), cette troisième partie se penche davantage sur les considérations typo-morphologiques du solfège, en convoquant les modèles théoriques que sont la Gestalttheorie et le structuralisme. Exploitant notamment le versant linguistique de la théorie musicale de l’après-guerre, l’auteure aborde diverses œuvres de musique concrète qui, loin de se limiter à l’incorporation de bruits, doivent procéder à une :

« désintégration » des systèmes de signification actuelle ou virtuelle. […] La musique concrète se présente donc comme un paradoxe : sous couvert d’un retour au sonore, elle opère en fait un double geste d’abstraction. (p. 247)

Le solfège réaliste de Pierre Schaeffer, fondé sur la théorie de la forme et la notion d’objet convenable, est alors abordé avec une réflexion particulièrement juste sur la manière dont la linguistique peut éclairer la recherche sur les modes de structuration généraux, convoquant des cas issus du pointillisme musical tels que John Cage et son œuvre pour piano, ou encore Christian Wolff et Earle Brown, chez qui l’espacement des notes, pour ne donner qu’un exemple, est suffisamment prononcé pour permettre à l’entendeur de « suspendre l’impression de structure globale » (p. 253). Opposant les théories de Boris de Schlœzer[16] à celles de Pierre Schaeffer dans leur conception de la structure, P. Nadrigny précise que la théorie de Schaeffer cherche à :

[…] dépasser l’idée d’une articulation musicale culturelle et à sortir du paradigme d’une écoute cognitive […]. Le projet schaefferien [souligne] la nécessité de quitter le comprendre pour l’entendre, « la logique pour le sensible », c’est-à-dire de produire l’articulation musicale à partir d’un matériau sonore libéré et révélé par des conditions d’audition acousmatiques. (p. 256-257)

Revendiquant la primauté de l’oreille et du travail d’écoute, Pierre Schaeffer nous invite à suspendre la composition au profit d’une réflexion sur la perception sonore elle-même et convoque la Gestalttheorie pour modéliser le champ d’émergence de l’objet sonore et penser les structures naturelles de sa perception. Pauline Nadrigny étudie ensuite les modes de structuration par lesquels l’objet sonore est perçu. Passant de la Gestalttheorie au structuralisme (Livre IV du Traité), Pierre Schaeffer a conscience que la réflexion autour de l’objet sonore remet en question les conceptions traditionnelles du solfège comme de l’écoute. Précisant qu’avec l’écoute réduite, l’objet sonore devient à lui-même sa propre structure, Pauline Nadrigny s’emploie à mieux définir cette pratique : l’écoute réduite, « plus qu’une simple mise entre parenthèses, consisterait à détourer l’objet sonore sur le fond de son environnement. Ce faisant, elle en préserve la structure, sans en maintenir le sens » (p. 268). L’écoute réduite place donc l’auditeur dans une posture paradoxale (à la fois « naturelle et contrariée », affirme l’auteure (p. 268), et cultive l’organisation « au détriment des renvois au contexte, scotomisant un pan de l’activité perceptive spontanée pour n’en retenir que l’empreinte, le contour dans le champ perceptif » (p. 268). Il s’agit alors pour le solfège d’établir des systèmes structurés mais dépourvus de déterminisme.

Étudiant le rapport du solfège à l’historicité au regard de l’ancrage traditionnel caractéristique des systèmes de notation musicale, Pauline Nadrigny propose une analyse du tableau récapitulatif du solfège de Pierre Schaeffer, surprenant d’exhaustivité sur le plan topologique et permettant à l’auteure, de surcroît, de souligner la subjectivité perceptive inhérente à toute expérience d’écoute. C’est pourquoi la constitution du solfège expérimental proposé par Pierre Schaeffer place la nécessité de « parler des sons » (p. 276) au premier plan, qualifiant celui-ci de « nécessité organique […] de posséder une terminologie adéquate, résultant d’une analyse réaliste de ce qui est distinctif ou sensible dans les objets qu’il utilise » (p. 276).

Entre l’approche naturaliste de l’écologie acoustique et l’approche interventionniste des musiciens électroniques, la position de Schaeffer est en effet intermédiaire. Le solfège schaefferien tombe certainement dans un piège de l’objet en ce qu’il s’enferme dans une certaine logique qui ne permet pas d’accéder au musical. (p. 281)

S’attachant à démontrer que le matériau sonore est historique et que les structures de la cognition sont au cœur du solfège de l’objet sonore, Pauline Nadrigny convoque plusieurs artistes (P. Boulez, I. Xenakis, O. Messiaen et K. Stockhausen) afin d’évaluer la réception des travaux de Schaeffer à la fin des années 1940. À ce titre, elle salue l’initiative du compositeur François-Bernard Mâche qui consiste à procéder, lors du processus de composition, à rebours de la démarche musicale en optant, a contrario, pour une « dé-composition »[17], et ce, afin d’éluder la détermination d’une orientation historique. Partant du constat que le neume a su mieux traiter la perception de l’objet sonore que le solfège classique qui lui a succédé, l’auteure rappelle la distinction opérée par Schaeffer entre « écoute musicale et écoute musicienne » (p. 298) :

L’écoute, ou l’invention, musicale, se réfèrent à l’acquis traditionnel, aux structures et aux valeurs établies et assimilées qu’elles cherchent à retrouver ou à recréer ; tandis que l’écoute ou l’invention musicienne cherchent plutôt à repérer de nouveaux phénomènes intéressants ou à innover dans la facture des objets sonores. (Pierre Schaeffer, Traité des objets musicaux, p. 41).

IV – Héritage et postérité de l’objet sonore : le mythe schaefferien

Pauline Nadrigny consacre sa quatrième et ultime partie, « Echos », à la relation qu’entretiennent la philosophie de l’écoute et du son, d’une part, et A) la poïétique, B) la notion de « paysage sonore » ainsi que C) la dimension mythologique du projet schaefferien.

Précisant que les critiques adressées à l’encontre de l’écoute réduite de Pierre Schaeffer n’enlèvent rien au vaste héritage de ses théories, l’auteure cite Joanna Demers[18], Francisco Lopez (figure du field recording contemporain) et enfin Günther Anders, qui, dans son article « Contribution à une phénoménologie de l’écoute » (2007), développe une conception de l’écoute impressionniste plus passive mais non dépourvue d’organisation dans la représentation du matériau musical. Stern « déconstruit l’écoute musicale traditionnelle pour la pensée comme une visée d’écoute possible (la perception attentive de l’écouter, opposé à l’entendre passif » (p. 315). Cela conduit l’auteure à prendre davantage en considération l’historicité de l’objet musical. Pauline Nadrigny place Schaeffer « au centre d’un paysage intellectuel hétéroclite mais cohérent quant à une position fondamentale sur l’écoute » (p. 317), en ce qu’il fut l’un des premiers à avoir promu la pratique du deep listening, terme se référant à une écoute active. Cette refonte du discours musical sous-tend une phase théorique au préalable. L’auteure distingue l’esthésique, concentrée sur les stratégies perceptives, de la poïétique, centrée sur le lien entre les intentions du compositeur et la réalité de son œuvre, aux fins de clarifier la position de Schaeffer, qu’elle situe « au seuil d’une poïétique et au fondement d’une esthésique future » (p. 318). Ses héritiers et commentateurs considèrent l’écoute réduite comme un projet inatteignable et c’est alors que Pauline Nadrigny distingue trois axes critiques : la composition et la nécessité de recourir à un matériau aux références extrinsèques ; l’inscription de l’écoute dans un environnement sonore global ; et les conditions socioculturelles de son activité.

À travers la notion d’auditum de Michel Chion et de « paysage sonore » de Murray Schafer, Pauline Nadrigny montre les prolongements théoriques réalisés par les successeurs de Pierre Schaeffer à partir de son projet. À la différence de l’objet sonore schaefferien, l’auditum de Michel Chion « est l’objet de toutes les écoutes – réduite, causal, figurative, sémantique, différents niveaux d’appréhension à la fois reliés et indépendants… »[19]. Quant au « paysage sonore » conçu par Murray Schafer, il se divise, selon un modèle pictural, entre tonalités (keynote sounds), signaux sonores (signal sounds) et marqueurs sonores (landmarks)[20]. Justifiant la notion de « mythologie » dans l’étude du sonore, l’auteure rappelle le sens du titre de son ouvrage :

La référence aux conditions d’émergence de l’objet ne se ferait pas alors sur le mode de l’histoire mais bien du mythe comme en témoigne la référence à Pythagore dans le nom même d’acousmatique. (p. 338)

Inscrivant l’objet sonore dans le cadre des sound studies et du constructivisme (avec Jonathan Sterne), l’auteure rappelle la dimension anhistorique de l’approche phénoménologique de Schaeffer ainsi que le rôle fondamental de la technologie sonore : « soutenir que les technologies sonores possèdent bien une forme d’autonomie dans les changements perceptifs qui scandent la modernité, ce n’est pas sacrifier à une vision essentialiste du son qui ne penserait pas la perception comme historique » (p. 343). Pauline Nadrigny distingue enfin Echo d’Orphée en précisant que ce dernier, accompagné de sa lyre, est une figure musicale tandis que la nymphe est « résolument une figure du sonore – et du discours. D’Orphée à (ses) Echos, il s’agit de rendre au sonore ce qui est au sonore » (p. 346). Ces pages, au ton uniment juste, mériteraient d’aborder l’héritage du projet schaefferien au sein d’une musique contemporaine plus vaste que le seul champ de la musique concrète, et où, au sein de divers genres musicaux du 21e siècle, la technicité transformative offerte par les Digital Audio Workstations (DAWs) et les enjeux acoulogiques sont légion. Ayant aujourd’hui pris une ampleur considérable au sein de l’industrie musicale, l’héritage des théoriciens de la musique concrète pose la question de l’évolution, sur le plan individuel et identitaire comme collectif et sociologique, des comportements humains, affectés ou non par ce voile de Pythagore. Dans quelle mesure l’acousmatique et les techniques électroacoustiques ont-elles contribué à modifier non seulement les conditions d’écoute mais aussi le comportement et les modes de pensée des individus soumis à cette pratique devenue incontournable ? C’est, de prime abord, une question à replacer dans le champ du virtuel : aux plateformes de streaming musical diverses telles que YouTube et Spotify, lesquelles requièrent une maîtrise de l’acousmatique (dans l’attente d’un volume de mastering réduit en général à -0.3 décibels, pour ne fournir qu’un exemple), s’ajoutent les pratiques d’artificialisation typiques des réseaux sociaux tels que Tiktok, qui supposent souvent un double voile (filtres visuels et auditifs). Quid des conséquences de telles pratiques, positives comme négatives, sur les rapports de l’individu à la société, et du débat opposant, encore aujourd’hui, les partisans d’une musique dite « puriste », ou, du moins, non modifiée par l’enregistrement, aux adeptes du studio et de la voix corrigée (Auto-Tune) ? De même, puisque l’auteure consacre une partie importante de son ouvrage aux techniques d’inscription musicale (on songe au solfège et aux néologismes nécessaires pour mieux décrire l’objet musical), il est vital de signaler les lacunes terminologiques des langues non anglophones dans ce domaine ainsi que leurs répercussions sur le plans esthétique et socioculturel. Soixante ans après les débuts de la musique concrète, c’est exclusivement en langue anglaise que se développent ces logiciels (DAWs) devenus studios portables et dont les vocables, employés pour mieux décrire l’objet sonore, restent non traduits en français, à titre d’exemple. Bien qu’éloignées du projet schaefferien et, partant, anachroniques, les nouvelles technologies du 21e siècle comportent également des accessoires consacrés à l’entendeur. A la lecture du Voile de Pythagore, le lecteur, édifié par l’étude de l’expérience sonore, songe à comparer les techniques électroacoustiques des années 1940 aux innovations technologiques en matière de conditions d’écoute aujourd’hui : transmission du son par bluetooth, casques, enceintes, monitoring, etc. Cette question mérite une attention particulière en ce qu’elle répond, à bien des égards, aux questionnements des penseurs de la musique concrète. Le lecteur non spécialiste de la question serait encore plus à même de saisir les enjeux de l’ouvrage, dont la teneur est tout à fait d’actualité bien que fondée sur les théories schaefferiennes du 20e siècle.

Conclusion

Si l’objet sonore se pense comme le résultat d’une « libération » de l’audible, cette libération se produit dans une poïétique : elle est fondamentalement construite et travaillée. (p. 364)

Concluant sur la nature polarisante de la notion d’objet sonore dans la littérature post-schaefferienne, Pauline Nadrigny rappelle les diverses modélisations de l’objet :

De l’objet perceptif au concept d’objet se construit cependant une modélisation de l’expérience que les gestes concrets ont permis de réaliser, de cristalliser. Cette modélisation, qui emprunte à des modèles théoriques divers – chimie, botanique, phénoménologie, théorie de la forme, structuralisme linguistique – construit l’objet en un autre sens : elle ne cherche pas à le produire mais à le penser. (p. 351)

Soulignant enfin le rôle majeur de la peinture et de l’architecture dans la pensée schaefferienne, l’auteure aborde l’antagonisme entre « sujet », au sens pictural, et « objet », « opposition qui a pour équivalent le rejet d’une organisation musicale du matériau au profit d’une étude de ses objets sonores » (p. 360). L’abstraction musicale et picturale est possible uniquement si elle est, de prime abord, une étude visuelle et sonore concrète. L’ouvrage de Pauline Nadrigny a cette qualité d’équilibre interdisciplinaire lui permettant de corriger les poncifs qui, au sein du projet schaefferien, ont fait l’objet de critique eu égard à la composition musicale, aux multiples solfèges conçus à travers le temps et à la philosophie de la perception. C’est pourquoi son intérêt dépasse le seul champ de la philosophie et trouve sa place au sein d’un contexte avant tout artistique et musical. C’est, en définitive, à tout entendeur que s’adresse l’auteure, toujours soucieuse de penser des conditions d’écoute optimale pour une expérience unique et multiple à la fois.

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[1] Pauline Nadrigny, Le Voile de Pythagore. Du son à l’objet, Paris, Classiques Garnier, coll. « Philosophies contemporaines », 2021, p. 17.

[2] Claude Bailblé, « Comment l’entendez-vous ? », in L’Audiophile, n°48, 1989, p. 51.

[3] Jean-Paul Sartre, L’Être et le Néant, Paris, Gallimard, 1943.

[4] Rainer Maria Rilke, Elégies de Duino, Sonnets à Orphée, trad. fr. J.-P. Lefebvre et M. Regnaut, Paris, Gallimard, 1994, p. 64.

[5] Pierre Schaeffer, À la recherche d’une musique concrète, Paris, Seuil, 1952, p. 52.

[6] Pierre Schaeffer, Essai sur la radio et le cinéma : esthétique de la technique des arts-relais (1941-1942), Carlos Palombini (éd.), Paris, Allia, 2010, p. 129-144.

[7] Pierre Schaeffer, Traité des objets musicaux, Essai interdiscipline, Paris, Seuil, coll. « Pierres vives », 1966, pp. 100-110.

[8] Ibid., p. 391.

[9] Abraham André Moles, Daniel Charles, Les Musiques expérimentales, Paris, Zurich, Bruxelles, Éditions du Cercle d’Art Contemporain, 1960.

[10] Pierre Schaeffer, À la Recherche d’une musique concrète, Paris, Seuil, 1952.

[11] Pierre Schaeffer, Traité des objets musicaux, Livre II, op. cit., p. 109.

[12] Edmund Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie pure et une philosophie phénoménologique, trad. fr. Jean-François Lavigne, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de philosophie », 2018.

[13] Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 1945.

[14] Sophie Brunet (dir.) Revue musicale, n° 303-305, 1977.

[15] Carl Stumpf, Tonpsychologie, vol. 1, Leipzig, Verlag S. Hirzel, 1890, p. 227.

[16] Boris de Schlœzer, Introduction à J.-S. Bach : Essai d’esthétique musicale, Paris, Gallimard, coll. W« Bibliothèque des idées », 1947, p. 305-337.

[17] François-Bernard Mâche, « La création musicale aujourd’hui » (1985), in Entre l’observatoire et l’atelier, Paris, Kimé, 1998, p. 41.

[18] Joanna Teresa Demers, Listening through the Noise: The Aesthetics of Experimental Electronic Music, Oxford: Oxford University Press, 2010, p. 29-30.

[19] Michel Chion, Le Son, Paris, Armand Colin, 2004, p. 273.

[20] Raymond Murray Schafer, Le Paysage sonore : le monde comme musique (1977), Marseille, Wildproject Editions, 2010, p. 384-402.

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