Totem cosmique et prophète argenté
Les figures du sacré dans Parabole de Stan Lee et Mœbius.
Charles Combette, Université Bordeaux Montaigne, EA 4593 CLARE. Professeur agrégé d’arts plastiques. Docteur en Arts (Histoire, Théorie, Pratique)
Parabole, une histoire mettant en scène le Silver Surfer, est née de la rencontre entre Stan Lee, scénariste prolifique de la maison d’édition Marvel comics, et Mœbius, fameux dessinateur français de Blueberry et de L’Incal. Dès sa redéfinition du personnage en 1968, lorsqu’il a été décidé de lui donner sa propre série, Stan Lee fait des aventures du Surfer d’argent une suite de contes philosophiques et donne une dimension christique à ce héros venu des étoiles. De ce point de vue, Parabole, publié près de vingt années après l’arrêt de la série originelle, constitue un aboutissement : au travers du conflit entre Galactus et le Surfer d’argent, ce sont les oppositions entre le sacré et le saint, entre l’institution et l’individu, et entre la domination et la libération qui sont mises en scène.
À partir de 1987, Epic comics, une branche de Marvel comics[1], ouvre ses pages à des publications provenant d’autres pays. C’est ainsi que sont traduites, et colorisées, diverses productions de Jean Giraud, alias Mœbius, comme Le Garage Hermétique, Blueberry ou L’Incal. Mœbius n’est alors plus tout à fait un inconnu en Amérique : ses travaux sur les préproductions des films Dune d’Alejandro Jodorowsky, Alien de Ridley Scott et Tron de Steven Lisberger, ainsi que l’édition de certaines de ces histoires dans la revue Heavy Metal, équivalent américain du magazine Metal Hurlant, ont déjà fait parler de lui.
En 1988, Mœbius déménage à Los Angeles. C’est alors qu’il rencontre Stan Lee par le biais d’une connaissance commune, ou lors de la tournée promotionnelle organisée par Marvel[2], et que les deux hommes se mettent d’accord pour réaliser ensemble une histoire du Silver Surfer. Celle-ci a pris pour titre Parabole (Parable en version originale). Selon la « méthode Marvel »[3], Stan Lee écrit l’histoire, sans indiquer de découpage précis, et Mœbius la met en image, élaborant lui-même la mise en page et le rythme du récit ; enfin les planches retournent à Lee qui écrit les dialogues dans les bulles laissées dans ce but par le dessinateur. On le voit, ce processus de création laisse une grande latitude au dessinateur qui peut mettre en scène l’histoire à sa convenance.
Mœbius a donc pu aborder Parabole à sa façon sans se soucier des règles habituelles qui régissent les comics de super-héros de l’époque : les pages comportent peu de cases, la mise en page est sobre, le dessin épuré ne met que peu d’emphase sur l’action et les émotions des personnages, les couleurs sont pastel conférant à l’ensemble une atmosphère onirique et méditative. Ce minimalisme apparaît comme une nouveauté aux yeux des auteurs américains. Dans un paysage jusque-là peu informé des codes de la bande dessinée européenne, Parabole fait figure de récit expérimental sur le plan graphique[4]. L’histoire remporte d’ailleurs l’Eisner award de la meilleure minisérie en 1989 succédant ainsi à Watchmen d’Allan Moore et Dave Gibbons.
Quant au récit, selon l’habitude de Stan Lee, il est de structure simple, prend la forme d’un conte tout en cherchant à aborder de vastes questionnements moraux. Résumons succinctement son argument. Dans un futur proche indéterminé et hypothétique[5], Galactus, le dévoreur de mondes, vient sur Terre et est rapidement adoré comme un dieu par l’humanité. En échange de cette vénération, Galactus n’exige qu’une seule chose : que chacun fasse ce qui lui plaît. Son objectif est d’amener les humains à se détruire eux-mêmes afin de pouvoir se nourrir de la Terre sans rompre son serment de ne pas attaquer les hommes. Le Surfer, ancien héraut de Galactus demeuré parmi les hommes, s’oppose au dévoreur de mondes, essayant de le convaincre, par la parole puis par la force, de quitter la planète bleue. Ce conflit est rejoué en parallèle à un second niveau par l’intermédiaire de deux protagonistes humains, frère et sœur : Colton et Elyna Candell. Le premier, un prédicateur télévisuel en perte de vitesse, s’autoproclame très vite prophète de Galactus, espérant ainsi s’accaparer l’aura divine du dévoreur de mondes. La seconde, quant à elle, est la seule à reconnaître la justesse du combat du Surfeur d’argent.
Parabole fonctionne ainsi selon des oppositions binaires : l’une majeure entre deux êtres aux pouvoirs quasi divins, l’autre mineure, écho de la première, entre deux simples mortels, chacune reflétant des conceptions opposées du divin. Pour mieux les comprendre, il va donc nous falloir étudier les quatre protagonistes de ce récit, quatre figures archétypales remplissant chacune une fonction claire dans le conte moral raconté par Stan Lee et Mœbius. Pour rendre les choses claires, nous les regrouperons selon leurs camps respectifs, celui du sacré (Galactus et Colton Candell) et celui de la sainteté (Le Surfer et Elyna Candell).
Figures du sacré
Si le sacré se définit par le pouvoir de sidération, par la capacité de terrifier et de fasciner ceux qui le contemplent, alors Galactus a toutes les apparences d’un être sacré. Rappelons brièvement l’origine et l’histoire de ce personnage démesuré. Galactus est une entité cosmique, la première à avoir été mise en scène chez Marvel comics. Il apparaît pour la première fois en 1966 à la fin d’un numéro de Fantastic Four presque entièrement dédié à son arrivée et intitulé The Coming of Galactus[6]. Son but est de dévorer la terre, non par méchanceté, mais par nécessité. Lorsque Galactus a faim, seule une planète pouvant abriter la vie peut satisfaire son appétit et lui permettre de survivre. S’il évite ordinairement de détruire des mondes peuplés d’une vie consciente, il s’y trouve tout de même parfois obligé, ce qu’il regrette. Sa stature gigantesque est à la hauteur de sa puissance. Galactus est un géant contre lequel personne ne peut rien, ses pouvoirs cosmiques le rendant invulnérable. C’est pourquoi, lors de cette première rencontre avec les terriens, il ne fut repoussé que par la menace de l’annihilateur ultime, une arme capable de détruire une galaxie entière, arme que le dévoreur de mondes conservait sous sa garde. En échange de sa restitution, Galactus fit une promesse : celle de plus jamais s’attaquer à l’humanité.
Dans Parabole, Galactus revient sur Terre. Son arrivée est mise en scène de façon spectaculaire par Mœbius. Sur plusieurs planches, les cases confrontent les dimensions dérisoires du monde des humains à la démesure du vaisseau du dévoreur de mondes dont la forme phallique signifie le caractère sacré (non sans un pointe d’ironie tant elle est explicitement reconnaissable). Le procédé est ensuite régulièrement répété, Mœbius prenant un malin plaisir à faire varier l’échelle des plans et à changer de points de vue sur le titan descendu du ciel. Galactus est d’ailleurs plus gigantesque que jamais. Écrasant tout ce qui l’entoure, emplissant le cadre, il surplombe les bâtiments et les hommes comme un enfant ses jouets. À cela s’ajoute que les cases prennent souvent un format vertical, ce qui renforce encore un peu plus l’impression de puissance d’un Galactus ainsi placé au-dessus de ceux qu’il rencontre.
Gigantisme, envahissement de l’espace, verticalité : autant d’éléments utilisés par Mœbius et traditionnellement associés à la puissance. Si Galactus est un être sacré, c’est donc avant tout par les signes de celle-ci et non par son caractère céleste – qu’il partage d’ailleurs avec un Surfer qui n’a rien de dominateur. Cette posture, qu’il adopte dès son arrivée, lui permet d’agir comme un dieu et d’imiter Jehova sur le mont Sinaï, qui, répondant à Moïse, dit « Je suis celui qui est ». De même Galactus dit-il : « Je suis Galactus »[7]. Ces mots ne sont pas simplement prononcés, ils tonnent dans le ciel, accompagnés d’un éclair. Ils sont traités graphiquement non pas comme des paroles, mais comme des onomatopées, comme du bruit. Les premiers mots de Galactus sont une explosion destinée à impressionner les humains, à les sidérer afin de pouvoir ensuite profiter de cet état de choc pour faire admettre sans peine aux mortels qu’il est bien un dieu : « Le Moment est mien. Le pouvoir est mien. La majesté est mienne, dit-il en haussant le ton entre chaque phrase[8]. » Puis, après avoir joué de l’effroi, face à la foule muette, Galactus offre le réconfort : « Vous avez trop longtemps subi la guerre, la pauvreté et le crime ! En contrepartie de votre hommage, je vous offrirai une ère nouvelle[9] ! » Galactus n’est donc pas seulement un corps, il est aussi un verbe.
Installé comme un totem impassible au milieu de la ville, Galactus agit ainsi comme un dieu. Mais attention, pas comme n’importe quel dieu. Toutes les caractéristiques de Galactus que nous avons évoquées en font un dieu païen, un dieu avec lequel on peut commercer, un dieu qui rend si on lui donne, c’est-à-dire, dans un contexte judéo-chrétien, un faux-dieu[10]. Galactus sait d’ailleurs très bien qu’il n’est pas un dieu ; et, si son irruption ressemble à une théophanie, c’est qu’il le souhaite pour subjuguer et manipuler la foule. Celle-ci se tourne d’ailleurs bien vite vers ce spectaculaire veau d’or, nous en reparlerons.
Tel un dieu, Galactus entend donner ses commandements, ou plutôt son commandement : « Je suis venu pour vous libérer. Vous libérer de la culpabilité ! Vous libérer des inutiles lois des hommes ! Si vous voulez être sauvés, Faites ce qu’il vous plaît ! Prenez ce que vous désirez ! Le mal n’existe pas ! Le péché n’existe pas ! Seule compte la jouissance ! … Ainsi a parlé Galactus[11] ! » Une seule loi : faire ce que l’on désire. Galactus pourrait passer pour un libérateur venu s’opposer aux institutions séculières, combattre les injustices commises par les hommes. Son intervention divine serait alors une sorte d’apocalypse, révélant aux hommes leur oubli des lois naturelles. C’est bien sûr cette apparence qu’il veut se donner : sans cela comment les humains pourraient-ils avoir foi en lui ? L’arrivée d’un dieu ne peut qu’être une catastrophe[12] pour l’ordre des mortels, sinon pourquoi serait-il venu ? Un dieu n’interviendrait pas directement dans le simple but de confirmer les institutions humaines.
Ce rôle que joue Galactus est intentionnel, il lui sert à manipuler l’humanité. Sachant très bien de quelle façon ses paroles vont être interprétées, le dévoreur de mondes espère que les êtres humains se détruiront entre eux, lui laissant ainsi la possibilité de se nourrir de la Terre sans briser son serment de non-agression ; si l’humanité s’anéantit d’elle-même, plus rien n’empêchera Galactus de satisfaire la faim qui le consume[13]. Tout cela fait de Galactus un faux dieu, un être amoral et trompeur dont les objectifs, que l’on peut qualifier de concrets, voire de triviaux, n’ont rien de transcendant.
Son plan qui consiste à détruire la loi par la loi est subtil. Sa parole a pour but de briser le pacte social en flattant l’égoïsme afin que chacun, se croyant justifié par son obéissance à une loi sacrée, donc hors de toute critique, puisse nuire aux autres. Lever ainsi les contraintes pour promettre une liberté peut sembler de prime abord salutaire à tous, mais la conséquence pratique et immédiate, c’est le chaos. L’homme devient un loup pour l’homme[14].
Ainsi voit-on mis en scène, dans Parabole, le double effet de l’introduction du sacré dans une société : d’un côté il unit les hommes autour de figures, de lois et de valeurs communes, de l’autre il fragmente la société en un dégradé de positions allant de la plus grande proximité au sacré jusqu’au profane, voire à l’impie. La présence du sacré entraîne divers comportements à son égard : certains individus s’en tiennent éloignés, par crainte ou respect, d’autres tentent inévitablement de s’en approcher. Bien vite, il ne reste qu’une alternative vis-à-vis de la communauté ainsi structurée : être avec ou être de facto contre. Ce sont ainsi d’autres liens qui sont brisés, des liens comme ceux que créent la compassion ou l’amour par exemple, ceux que défendent le Silver Surfer et Elyna Candell comme nous le verrons.
Galactus ayant mis fin au gouvernement des hommes pas les hommes en lui retirant toute légitimité par sa nature prétendument divine et l’édiction d’une loi qui le remet en cause, l’État n’a plus comme autorité que celle de la force. La situation dégénère donc rapidement, ne se stabilisant qu’entre le chaos et la loi martiale. Dans ce trouble, quelqu’un entend bien occuper le vide laissé par l’État. Il s’agit de notre second protagoniste : Colton Candell.
Ce personnage, spécialement créé pour Parabole, n’a pas un nom anodin. Candell ressemble phonétiquement au mot anglais Candle qui signifie chandelle, bougie, cierge. Ce patronyme évoque donc autant la lumière – divine dans ce contexte, cela va sans dire – que le cierge, instrument traditionnel des rituels religieux (notamment chrétiens). Dans les deux cas, c’est la fonction de prédicateur du personnage qui est redite. Mais la chandelle peut aussi renvoyer à deux autres choses. D’une part, à son caractère d’imitation artificielle de la lumière naturelle ou divine, et donc à sa facticité ; Colton Candell se positionne comme un écho de Galactus sans avoir une once de sa puissance. D’autre part, à la fragilité de la vie humaine et des convictions qu’elle peut soutenir ; après l’avoir ravivé grâce à l’apparition de Galactus, Colton voit son pouvoir d’influence s’éteindre bien vite après avoir brillé.
Au début de Parabole en effet, la situation de Colton Candell n’est pas florissante. Il le dit lui-même : « Mon ministère télévisuel touchait autrefois des millions de gens… Mais le public est volatile. Je perds mes fidèles. » Aussi voit-il en Galactus une opportunité de « renverser la vapeur[15]. » Son intention est simple : s’accaparer une partie de l’aura sacrée de Galactus. Aussi annonce-t-il à la télévision : « Galactus est venu répondre à ma prière. C’est moi qui l’ai appelé ! Loué soit le Seigneur[16] ! »
Colton a beau se présenter comme son prophète et prétendre communiquer avec lui, il ignore quand même tout des intentions du dévoreur de mondes ; jamais il ne le rencontre, jamais il n’a de révélation qui lui serait personnelle. Si celui-ci est un faux dieu, Colton Candell est quant à lui un faux prophète. Le Surfer le dénonce d’ailleurs comme tel : « Faux prophète. Tu es une honte pour ta fonction[17]. » Comme tout charlatan, il poursuit avant tout son intérêt individuel, c’est-à-dire le pouvoir qu’il peut s’approprier en se situant dans le sillage de Galactus, ne réfléchissant pas aux conséquences de ses discours sur les autres. À ce titre, la véritable nature du dévoreur de mondes n’est pas un enjeu pour lui : « Galactus est mon strapontin vers le pouvoir. Quelle importance qu’il soit divin ou non[18] ? »
Mais quel pouvoir cherche-t-il ? Est-ce celui de s’élever ? De se rapprocher du divin ? Non, c’est un pouvoir beaucoup plus terre-à-terre, il l’exprime clairement : « Seuls ceux qui croient aveuglément peuvent être contrôlés comme des pantins. Seuls ceux qui font taire leur sens critique peuvent être dominés par ceux de ma trempe[19]. » L’objectif, c’est de diriger les hommes, c’est donc, sous couvert de religion, du pouvoir politique dont il s’agit. Aussi n’est-il pas étonnant que Colton conteste la légitimité du président et veuille, au nom de Galactus, le remplacer.
Si Galactus est l’incarnation du pouvoir naturel, Colton quant à lui est le symbole du pouvoir institutionnel et de ses dérives ; l’autorité sacrée de Galactus vient de lui-même, de ce qu’il peut faire, de sa nature, l’autorité de Colton vient du discours, de sa capacité à manipuler les signes du sacré pour provoquer l’adhésion des fidèles (ou plutôt leur soumission, leur intérêt n’entrant pas en ligne de compte). Son comportement n’est donc pas celui d’un prophète touché par la grâce divine, mais celui d’un prêtre se servant du sacré plus qu’il ne le sert.
La bande dessinée étant un art qui communique visuellement par le dessin, c’est bien l’apparence d’un prêtre que Mœbius a choisie pour Colton Candell. Il porte de longues robes de cérémonie violettes, évoquant tout à la fois la pourpre des costumes ecclésiastiques des évêques, la couleur de son faux dieu Galactus et l’une des couleurs traditionnelles du mal dans les comics[20]. Signalons aussi qu’il est blond, caractéristique qu’il partage avec sa sœur, renvoyant à leur nom de famille et faisant signe vers la pureté. Sur sa soutane, comme tout représentant religieux, il porte un symbole : une sorte d’étoile à quatre branches (une source de lumière encore une fois) dont la forme n’est pas sans rappeler la croix chrétienne. Derrière Colton Candell, c’est donc bien la religion, dans tout ce qu’elle a de protocolaire et d’institutionnel, qui est visée, ainsi que son décalage avec le message divin, vite oublié pour des considérations plus triviales comme le pouvoir sur les masses. Visuellement, dès les premières cases où il apparaît, tout est dit de Colton Candell ou presque : il est une figure allégorique de la religion qui s’oppose à l’individu et veut le contrôler. C’est à cette conception autoritaire du sacré que s’opposent les deux autres protagonistes de Parabole.
Figures de la sainteté
Le Surfer d’argent est une création de Stan Lee et Jack Kirby, et surtout de ce dernier. En effet, Jack Kirby estimait qu’un personnage de l’importance de Galactus se devait d’avoir un héraut pour annoncer sa venue[21]. C’est ainsi que celui-ci fait sa première apparition, cabriolant dans l’espace entre les météores et les comètes, à la recherche d’une planète pour nourrir son maître. Cette version du Surfer fait de lui un véritable extra-terrestre, un étranger au sens fort du terme, qui ne comprend pas grand-chose à l’humanité : ni ses sentiments, ni sa façon de se nourrir, ni son goût pour l’art ou la décoration[22]. La mort de l’humanité ne le perturbe pas vraiment, il ne la voit pas comme une destruction, mais comme une simple transformation en énergie propre à sustenter Galactus. C’est son improbable rencontre avec Alicia Masters, la compagne aveugle de la Chose, qui réveille à temps sa conscience, lui fait ressentir de la pitié et l’amène à se dresser contre le dévoreur de mondes.
Le personnage est ensuite radicalement redéfini lorsqu’il obtient sa propre série toujours écrite par Stan Lee, mais cette fois dessinée par John Buscema. Celui-ci lui donne une allure plus élancée et fragile qui s’accorde bien avec le nouveau caractère du personnage. En effet, si le Surfer peine toujours à comprendre les humains, ce n’est plus à cause de son inhumanité, mais parce qu’il est au contraire trop humain. C’est que Stan Lee a voulu transformer le personnage et en faire une figure compassionnelle se lamentant sur les tourments de l’humanité. Aussi déplore-t-il la guerre, la tyrannie, la pauvreté, etc. Et en voulant les combattre, il se trouve bien souvent incompris et rejeté par les humains. Le Surfer devient un marginal et même une figure christique.
On l’aura compris, c’est cette version, et non celle de Kirby, que Parabole met en scène. Elle en constitue même l’aboutissement. Marginal, jamais le Surfer ne l’avait autant été. Presque oublié de tous, seul, il erre inconnu parmi les foules, caché sous des oripeaux de S.D.F. – « Je croyais que tu n’étais qu’une légende[23] », lui dit Elyna lorsqu’il se révèle à elle en enlevant son déguisement.
C’est sous ces vêtements des plus humbles, qu’il observe l’humanité avant la venue de Galactus. Il est alors presque inactif – il dort trop selon ses propres termes – et a perdu de sa compassion pour les humains qui se font eux-mêmes du mal. Aussi s’est-il caché de ceux-ci, tout en restant près d’eux, étant incapable de les abandonner à leur sort. C’est l’arrivée de Galactus qui le réveille. Tel un personnage mythique, il n’existe que pour la tâche qu’il doit accomplir. Ces vêtements indiquent sa passivité, son état de délabrement physique et mental, sa perte de volonté. C’est pourquoi il doit les quitter pour retrouver sa véritable nature, celle d’un corps blanc, nu et lisse. Un corps qui évoque immédiatement sous le crayon de Mœbius une âme pure, désincarnée et lumineuse, un corps céleste plus que terrestre[24].
Sa révélation à Elyna Candell n’a pas le caractère spectaculaire de l’irruption de Galactus. Elle n’est destinée qu’à une personne dans un lieu à l’écart. Comme toute réelle conversion, elle est intime, sans autre témoin que le divin et celui à qui il se montre. On voit par là que le Surfer est lui aussi du côté du divin, Elyna assumant alors le rôle d’un apôtre capable de reconnaître les vérités supérieures. Notons aussi que cette reconnaissance a lieu au cours d’une conversation. Là où Galactus dit ses ordres, le Surfer dialogue. Et doute. Il ne sait pas s’il va réussir, mais pense que chacun peut changer le monde. C’est pourquoi il choisit tout de même de se confronter à son ancien maître.
Contrairement à celui-ci, le Surfer d’argent n’a donc pas de plan prémédité. Il réagit selon son instinct, selon ce qu’il croit juste. Ce qui le motive, c’est la vérité et comme tous ceux qui la disent lorsqu’elle ne peut être entendue, le Surfer se trouve rejeté. Mais peu importe pour lui qu’il soit seul. Peu importe que la foule l’accuse d’hérésie ou cherche à le tuer. Aux lois des institutions, à celles des faux dieux, il oppose ce que l’on pourrait nommer la loi naturelle : une morale qui, comme celle de Schopenhauer, repose sur ce socle minimal, mais indestructible, qu’est la compassion. Aussi est-ce une loi individuelle qui ne s’édicte pas, mais se ressent, qui ne s’impose pas de l’extérieur, mais s’éprouve à l’intérieur. C’est pourquoi il tente de motiver les gens à agir par eux-mêmes, à se détourner de Galactus, à ne pas croire en lui et à entendre raison. Tentative vouée à l’échec.
Se trouvant bien vite seul contre tous, le Surfer n’a d’autre choix que d’affronter physiquement Galactus. Ce combat, qui cause de spectaculaires destructions, voit se déchaîner la puissance cosmique détenue par les deux personnages. Mais ils en usent différemment. Sans surprise, Galactus la manipule comme une force brute. Invulnérable, il se contente d’attaquer. Le Surfer quant à lui esquive avec légèreté puis réplique quand il le peut. Toutefois, la lutte est inégale, et le Surfer ne peut que la perdre. Il en est conscient et sait bien que ce n’est pas par la force qu’il pourra chasser le dévoreur de mondes. Mais n’ayant d’autres ressources, il accepte d’avance d’échouer et de sacrifier sa vie pour sa cause.
Comme tout bon saint, cette perspective ne le retient pas, le bien de l’humanité primant à ses yeux. Ainsi est-il au bord de la mort lorsque Galactus, décidant d’en finir avec son ancien héraut, s’apprête à le tuer. Le Surfer fait ainsi la preuve du caractère saint de ce en quoi il croit. C’est aussi le cas des auteurs du récit qui, en montrant leur héros consentir à la mort, signifient la validité de ses croyances, d’autant plus que cette action fait évidemment écho à la passion du Christ. Le Surfer se voit ainsi propulsé au rang des prophètes bibliques qui payent de leur corps et parfois de leur vie la révélation du divin qu’ils professent. Cela nous permet d’ailleurs de comprendre que, dans Parabole, le divin n’est pas affaire de légitimité institutionnelle ni de puissance, ces deux éléments étant fortement critiqués comme on l’a vu, mais de principes individuels portés par la foi d’une personne. Ceux-ci forment un ensemble un peu vague – trop de précision à ce sujet empêcherait sans doute certains lecteurs de s’identifier à eux et donc de prendre parti pour le Surfer[25] –, il est question de cœur, d’honneur, de pureté, de chaleur, de bonté, du caractère précieux de la vie… Mais le socle de tout cela, l’affect moteur, celui qui pousse les personnages à faire le bien c’est la compassion. C’est sa compassion pour l’Humanité que le Surfer avait perdue et qu’il retrouve en étant témoin des actes de Galactus. C’est aussi elle qui finit par pousser la foule, et Colton Candell avec elle, à se détourner de leur faux dieu venu de l’espace.
Ce qui déclenche la compassion de la foule, ce n’est pas la souffrance du Surfer d’argent. Le sacrifice efficace, celui qui in fine retourne la situation, ce n’est pas lui qui l’accomplit, c’est Elyna Candell, une simple humaine. Après que le Surfer s’est révélé à elle, Elyna prend conscience de la folie qui l’entoure et décide de voler l’hélicoptère du maire venu rendre visite à son frère pour aller à la rencontre de Galactus. Mais à peine a-t-elle décollé qu’elle est blessée d’une rafale tirée par un des gardes. Le coup étant mortel, Elyna n’a dès lors plus rien à perdre et ne veut pas « mourir en vain[26] ». Elle tente donc d’atteindre Galactus, ce qui est malheureusement impossible surtout pour une humaine insignifiante. Trop occupé à vouloir anéantir son ancien héraut, il empêche celui-ci d’arrêter la chute de l’hélicoptère. Alors qu’il en a le pouvoir, Galactus ne fait rien non plus pour la sauver. C’est ce qui le perd au final.
Mais, si Elyna Candell meurt, sa flamme n’a pas été soufflée pour autant, et sa lumière continue de briller. Car cet événement a été filmé, et toute l’humanité découvre l’absence de considération de Galactus pour cette femme qu’il juge sans « aucune importance[27] ». Et, si nul n’a pas vraiment réagi à la lutte menée par le Surfer, la mort de cette innocente lève le voile de l’adoration qui obscurcissait son jugement et provoque sa colère à l’encontre du dévoreur de mondes. Sans doute fallait-il un être humain pour déclencher l’émotion de la foule. Difficile pour celle-ci de s’identifier au Surfer, un être tout aussi étranger et divin que Galactus – celui-ci étant de plus considéré comme un dieu, le Surfer ne pouvait apparaître que comme un diable[28]. La compassion nécessite une similitude de nature, une ressemblance pour pouvoir exercer son effet.
La foule se retournant contre Galactus, elle prive celui qu’elle avait vénéré du pouvoir d’accomplir son plan ; les humains, ayant désormais un ennemi commun, ne peuvent plus se détruire entre eux. Ainsi Galactus, qui croit que « le pouvoir est tout[29]! », comprend-il que celui-ci, quelle que soit son intensité, ne suffit pas s’il n’est pas reconnu et accepté. On retrouve ici le constat de La Boétie : la servitude est volontaire, notamment lorsque le sacré se superpose au pouvoir pour le rendre légitime. Le pouvoir, ne peut subsister sans adhésion, sans croyance dans ce qui est vénéré. La crainte ne suffit pas. Aussi Galactus, qui n’est que pouvoir, n’a-t-il jamais eu que l’apparence du divin : il était en quelque sorte destiné à chuter in fine. Constatant que son plan ne peut plus marcher, Galactus, qui n’est affecté d’aucun désir de vengeance, quitte la Terre.
Même Colton Candell, duquel s’était pourtant détournée Elyna, revient à la raison comprenant qu’en se prétendant prophète de Galactus et en lui donnant ainsi une légitimité supplémentaire, il a fait le jeu du diable. Serait-ce alors lui le véritable apôtre, comme une sorte d’équivalent de Paul de Tarse ? Cela ferait de sa sœur Elyna la véritable sainte de l’histoire, la véritable figure christique, bien avant le Surfer lui-même. Elle seule meurt en martyre, et elle est humaine, qualité dont est privé le Surfer d’argent, trop divin par nature.
Cela dit, lui aussi accomplit un sacrifice à la fin du récit. Une fois Galactus parti, il est invité aux Nations-Unies, les hommes veulent présenter leurs excuses à celui qui les a sauvés. Mais lorsque celui-ci tente, une nouvelle fois, de leur expliquer qu’« aucun homme n’est au-dessus d’un autre » et que « l’étincelle du divin est en chacun… ou en personne ! », il est de nouveau incompris. L’assemblée perçoit cette humilité comme « l’essence même du sacré » ; « s’il n’est pas un dieu, c’est un saint », « vous devez nous guider ! Nous serons vos disciples » disent les délégués. Ayant perdu un faux dieu, les humains, trop immatures pour s’aimer les uns les autres, en cherchent un nouveau. Aussi le Surfer choisit-il de provoquer l’assemblée, de leur donner des ordres à la façon de Galactus, d’exiger leur soumission.. Attisant ainsi la haine contre lui, le Surfer rappel à la population l’erreur qu’elle a déjà commise et l’oblige à assimiler définitivement qu’il n’y a aucun espoir à attendre lorsqu’on remet sa vie entre les mains d’un être supposément supérieur. Devenu le catalyseur de la colère des hommes, le Surfer endosse volontairement la fonction de bouc émissaire[30].
Parabole se termine ainsi sur l’opposition entre la foule et le Surfer mise en scène sur les deux dernières planches par un travelling arrière montrant un magma indéterminé d’humains puis le Surfer seul sur sa planche contemplant la Terre depuis l’espace.
Comme on l’a vu, le divin qui est mis en scène dans Parabole ne se confond pas avec le pouvoir physique et n’est accessible qu’individuellement, les institutions se réclamant de lui pouvant très bien être corrompues ou mensongères. Le centrage du récit sur des individus exceptionnels n’a rien non plus se surprenant tant il s’agit d’une loi d’un genre super-héroïque où ceux-ci sont les moteurs indispensables des récits. Dans le cas de Parabole, remarquons qu’il n’y a que quatre protagonistes et une foule indéterminée que ceux-ci se disputent. Cette histoire rejoue ainsi les codes classiques qui font de l’affrontement entre êtres extraordinaires le support d’oppositions morales ou idéologiques. Notons néanmoins que Parabole a une particularité, celle d’introduire parmi ses protagonistes deux humains normaux, sans pouvoirs étonnants. Cela était sans aucun doute nécessaire étant donné la nature du propos soutenu par le récit. Comment défendre l’idée que le divin est en chacun, si l’on ne le montre qu’au travers de personnages surhumains ? Ainsi, le saint se déploie-t-il ici comme un attribut à la fois universel et personnel. Et même, allons plus loin : c’est parce qu’il est personnel, accessible uniquement individuellement, qu’il est universel et véritablement saint, c’est-à-dire sans incarnation figée qui permettrait de le capturer au profit de quelques-uns. Si le sacré sidère, le saint appelle à lui. Fait de compassion, de cœur et d’humanité, il ne peut exister que lorsque quelqu’un, fût-il seul, accepte de le recevoir et se laisser guider par lui[31]. Notons, pour finir, qu’il agit comme une vocation, une sorte d’impératif catégorique sur ceux qui en font l’expérience. Un impératif non pas kantien, mais plutôt schopenhauerien, et quelque peu pessimiste quant à la capacité de l’humanité à le comprendre, car fondé sur la compassion.
[1] Epic comics est lancé en 1982 par Marvel sous la direction du rédacteur en chef de l’époque : Jim Shooter. Celui-ci devait permettre aux auteurs publiés sous ce label de conserver la propriété de leurs créations, chose alors impossible chez les éditeurs mainstream. L’objectif était de calmer les revendications de nombreux scénaristes et dessinateurs qui se sentaient floués par le fonctionnement traditionnel des maisons d’édition. En effet, depuis les débuts des comic books dans les années 1930, les auteurs étaient obligés par contrat de céder les droits de toutes leurs inventions (personnages, lieux, concept, etc.) et d’accepter que celles-ci appartiennent définitivement à l’éditeur, le refus de ces conditions n’offrant d’autre alternative que le chômage. L’émergence d’auteurs-stars, dont il est difficile de se séparer sans s’aliéner une partie des fans, et d’une politisation grandissante des auteurs à partir des années 1970, a amené peu à peu à aménager ces règles. Le label Epic permettait aussi à Marvel de publier des récits plus adultes, ne se pliant pas aux règles de la Comic Code Authority, puisqu’ils n’étaient disponibles que dans les boutiques spécialisées. Pour plus d’informations à ce sujet, lire Sean Howe, Marvel Comics – L’Histoire Secrète, Modène, Pannini books, 2015, p. 284 et suivantes.
[2] Hasko Baumann, Moebius Redux – Une Vie en Images [documentaire], France-Allemagne, Arte, 2007, 34min20s à 40min.
[3] Stan Lee et John Buscema, Comment Dessiner les Comics – La Méthode Marvel, Paris, Akileos, 2010.
[4] C’est en tout cas ainsi que le perçoit Mike Mignola à l’époque. Dans le documentaire Moebius Redux, il dit avoir espéré en vain voir s’ouvrir de nouvelles possibilités d’expérimentations pour les auteurs de comics grâce à cette publication. Op.cit., 37min20s.
[5] Qualifier ce futur d’hypothétique peut surprendre, toute fiction l’étant semble-t-il par nature. Si nous utilisons ce terme ici, c’est pour signaler que Parabole ne prend pas place dans la continuité officielle de l’univers Marvel. Cette histoire n’est qu’une possibilité parmi d’autres, une variation qui est peut-être issue d’une réalité alternative. Rien n’indique qu’il s’agit du véritable avenir du Surfer, rien n’indique le contraire non plus.
[6] Le fait est alors inédit. Les comic books n’étalaient encore que rarement leurs histoires sur plusieurs numéros, la norme étant encore largement à des récits indépendants et clos sur eux-mêmes. Transformer les comics en feuilletons est d’ailleurs une des nouveautés apportées au genre super-héroïque par les auteurs de Marvel comics dans les années 1960. Il était donc absolument nouveau de consacrer plus de la moitié d’un épisode à l’évocation d’un personnage n’apparaissant que sur la dernière page, et encore plus étonnant de continuer l’histoire sur deux épisodes supplémentaires. Ce choix est bien sûr destiné à souligner l’envergure de ce nouveau venu et à donner une ampleur particulière aux événements auxquels il va participer. Dès sa première apparition, Galactus bouleverse les cadres éditoriaux habituels, parant le personnage d’une démesure qui le rend unique. Stan Lee et Jack Kirby, The Coming of Galactus, Fantastic Four #48, États-Unis, Marvel comics, mars 1966.
[7] Stan Lee et Moebius, Parable, New-York, Marvel comics, 1988-1989. Pour cette article nous utilisons la traduction française de Makma et Ben KG (in Parabole, Modène, Panini comics, coll. « Marvel graphic novels », 2014), hélas sans pagination.
[8] Ibid., s.p.
[9] Idem.
[10] En effet, dans la Bible, ni le pouvoir divin ni sa bénédiction ne se monnayent. En témoigne la dispute entre l’apôtre Pierre et Simon le magicien dans les Actes des Apôtres : « Que ton argent périsse avec toi, parce que tu as pensé acquérir avec de l’argent le don de Dieu. » Nouveau Testament, Acte des Apôtres, version Louis Segond, 1910, disponible en ligne sur Wikisource : https://fr.wikisource.org/wiki/Bible_Segond_1910/Actes_des_Apôtres
[11] Parabole, op cit., s.p.
[12] Au sens étymologique de renversement.
[13] Galactus utilise l’humanité comme un moyen et non comme une fin, ce qui fait de lui un être immoral dans ce récit à l’idéologie kantienne sous-jacente. Le fait est récurrent, il parle des humains comme des vies transitoires sans importance par rapport à sa survie dès sa première apparition. Stan Lee et Jack Kirby, If This Be Doomsday, Fantastic Four #49, États-Unis, Marvel comics, avril 1966.
[14] Qu’il le soit par nature ou qu’il s’agisse d’un effet de l’état déplorable de la société dans laquelle il vivait avant l’arrivée de Galactus n’est pas clairement établi.
[15] Parabole, op.cit., s.p.
[16] Idem
[17] Idem, ce qui montre également que le Surfer croit qu’il peut y avoir de vrais prophètes.
[18] Ibid., s.p.
[19] Idem
[20] Les costumes des super-héros étant la plupart du temps teintés de couleurs primaires, leurs antagonistes portent logiquement des complémentaires, notamment le vert et le violet. Les exemples sont nombreux : Lex Luthor en armure combine les deux, le Bouffon Vert et Kang le conquérant également, le Joker et le Baron Zemo quant à eux sont majoritairement violets.
[21] Sean Howe, Marvel Comics – L’Histoire Secrète, op.cit., p.93.
[22] Stan Lee et Jack Kirby, Fantastic Four #49, op.cit.
[23] Stan Lee et Moebius, Parabole, op.cit., s.p.
[24] Ceci est confirmé par l’intéressé lui-même : « Mon Silver Surfer, d’un autre côté, défie la gravité. Il flotte. […] L’idée de dessiner le Surfer me rendait nerveux au début parce que c’est un personnage qui n’émane pas spirituellement de moi, mais qui a déjà été défini par d’autres artistes, tels que Jack kirby et John Buscema. Ils ont fait de lui un être athlétique et puissant. Presque un guerrier. Je voulais aborder cet aspect aussi, mais sans les copier. / Je devais faire attention et trouver une solution à ce problème. Cela m’est venu naturellement : mon Surfer incarne la grâce. Je le vois très serein et élégant. Il est tellement puissant qu’il fait tout sans effort, avec délicatesse, même lorsqu’il est blessé ou désespéré. Mon Surfer ferait du taï chi, comme moi ! » « Les coulisses de Silver Surfer : Parabole par Moebius », ibid., s.p.
[25] Ce qui permet de plus à chacun de les interpréter selon ses propres croyances, selon son propre réseau de valeurs et de projeter celles-ci dans le récit. Parabole n’est pas, de toute façon, un récit didactique, ni une leçon de catéchisme ou d’idéologie, mais une fiction.
[26] Ibid., s.p.
[27] Ibid., s.p.
[28] La foule invective le Surfer, le qualifiant d’« hérétique », de « salaud ». Quant au mot « diable », c’est Colton qui l’utilise considérant que sa sœur « s’est laissé berner ». Ibid., s.p.
[29] Ibid., s.p.
[30] Dans le tumulte, un seul a compris les intentions du Surfer : Colton Candell. Lui seul regrette son départ. Mais, il persiste tout de même dans l’erreur en cherchant encore à voir le Surfer comme un sauveur et en estimant que les hommes ne méritent pas le sacrifice que celui-ci vient de faire.
[31] Ce serait là l’enseignement moral que cherche à nous dispenser Parabole, qui se conforme ainsi à son titre.