Quelles sont les réactions ?
Nolwenn Picoche
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a) L’écologie profonde
Le premier à utiliser le terme de « deep ecology » est Arne Naess dans un article publié pour la première fois en 1973 où il définit huit principes essentiels à l’écologie profonde. Voir annexe. Selon Roger Ribotto, l’écologie profonde se définit d’après deux principales caractéristiques : la réalisation de soi et le biocentrisme. Il affirme que pour se réaliser : « toutes les formes de vie doivent se réaliser en même temps. Le bien-être de l’homme doit être cohérent avec celui des non humains »[1].
Le développement des sciences et de la technique va avoir une autre conséquence : l’anthropocentrisme. « L’anthropocentrisme distingue si fort la nature de la culture que pour lui la spécificité de l’homme est d’être anti-nature »[2]. L’écologie profonde dénonce cet anthropocentrisme pour un biocentrisme qui place la vie sous toutes ses formes au centre. La vie est une valeur en soi. Les écologistes profonds se définissent comme : « des gens qui pensent que le monde naturel possède une valeur intrinsèque, qui cherchent à mettre fin à la tentative de domination de la société industrielle sur la biosphère »[3]. Hans Jonas explique dans Le principe Responsabilité, selon Roger Ribotto, que « L’homme ne doit pas respecter son seul intérêt, sa seule valeur mais également les valeurs de la nature. Valeurs qui existent en elles-mêmes que l’homme existe ou non »[4].
Certaines dérives ont contribué à faire des membres de l’écologie profonde des extrémistes environnementaux ou des anti-humanismes. L’anthropocentrisme est enraciné dans nos traditions, ce qui fait que l’amour de la nature passe automatiquement pour une haine de l’homme. Dans ses fondements, l’écologie profonde défend toute forme de vie. Cette vision négative de l’écologie profonde vient du fait que certains penseurs ont affirmé que le seul moyen pour que l’humanité vive dans le respect du vivant est de diminuer le nombre d’hommes. Ainsi Arne Naess explique : « Le bien-être humain est compatible avec une diminution de la population. Le bien-être non humain exige, lui, cette diminution »[5]. Il faut ajouter que Arne Naess a lui-même déclaré que ses principes n’étaient pas applicables.
b) L’hypothèse Gaïa
Le premier à formaliser la théorie de Gaïa est James Lovelock dans La Terre est un être vivant, L’Hypothèse Gaïa en 1979. Récemment il est revenu sur son hypothèse Gaïa pour dénoncer les effets de l’action humaine sur elle dans La revanche de Gaïa où il rappelle la définition de Gaïa :
Gaïa commence là où les roches de la croûte terrestre entrent en contact avec le magma incandescent (…) traversant l’air jusqu’à la thermosphère (…). C’est un système physiologique dynamique qui inclut la biosphère et maintient notre planète, depuis plus de trois milliards d’années, en harmonie avec la vie (…) elle semble destinée à réguler le climat et la chimie de la Terre de façon optimale et propice à la vie.[6]
Selon James Lovelock, Gaïa dispose d’un régulateur de température interne qui adapte la température aux modes de vie qui sont sur Terre. Le problème est que les hommes ont déréglé ce régulateur en augmentant la température de façon artificielle : « Nous gênons la régulation de la température en ‘montant le chauffage’ et supprimons simultanément les systèmes naturels censés la régler »[7]. C’est pourquoi « La Terre répondra à ce que nous lui faisons subir »[8].
En effet, pour James Lovelock, Gaïa augmente ou diminue sa température afin d’atteindre des « seuils » où elle se stabilise. En augmentant sa température artificiellement, les hommes amènent Gaïa à se réchauffer pour atteindre le seuil supérieur ainsi « Gaïa est en train d’évoluer, conformément à ses règles propres, vers un nouvel état dans lequel nous ne serons plus les bienvenus »[9]. Afin d’éviter cet effondrement James Lovelock explique qu’il faut « réduire l’empreinte que notre civilisation impose à la terre »[10]. Toutefois il reste lucide en expliquant que « nous ne pouvons pas arrêter le moteur de notre civilisation sans nous crasher »[11]. Contrairement aux thèses écologiques, il souhaite une action de chaque pays individuellement conscient que les pays n’arriveront pas à se mettre d’accord. De la même façon, il défend l’énergie nucléaire la considérant comme un « moindre mal et le seul remède efficace dont nous disposons pour ménager la planète »[12]. Il explique qu’il est trop tard pour les énergies renouvelables, en tout cas sous leur forme et leur utilisation actuelles.
Il reconnaît le rôle de la technique : « à mon avis, le téléphone portable, Internet et les jeux électroniques vont dans le bon sens ; ce sont des activités peu gourmandes en énergie, contrairement aux déplacements en voiture ou en avion »[13]. Il ne rejette pas qu’une solution puisse être trouvée grâce à la technique : « Il s’agit certes de solutions techniques, mais si elles sont efficaces, nous aurions tort de ne pas les appliquer »[14]. Mais il nous met en garde contre une dépendance vis-à-vis de la technique : « Plus nous touchons à la composition de l’atmosphère terrestre et essayons d’ajuster son climat, plus nous avons la lourde responsabilité d’adapter la planète à la vie »[15].
c) Sortie de secours
Après L’Humanité disparaîtra, bon débarras !, Yves Paccalet a écrit Sortie de secours où il essaye de trouver une solution à l’extinction prochaine de l’homme. Une des causes de cette disparition est écologique. Sa solution consiste en la décroissance : « la décroissance signifie moins de saccages, moins de déchets, moins de laideur »[16]. Il faut arrêter de vouloir la croissance qui est un « mythe » et ne pas penser que la technique peut apporter des solutions aux problèmes écologiques :
Si nous voulons nous en sortir, ne comptons pas sur les percées scientifiques (…) et pas davantage sur les ‘révolutions’ techniques (…) Nous ne nous sauverons pas non plus à coups de mots d’ordre creux et de babils politiques ou économiques, au premier rang desquels je range le fameux ‘développement durable’ dont nul ne pourrait dire en quoi il consiste.[17]
Pour Yves Paccalet, « Nous devons nous persuader que seule une vigoureuse décroissance nous permettra de garder forte et saine notre mère Gaïa »[18]. Il ajoute : « nous n’avons plus qu’une alternative : la décroissance ou le néant »[19]. Cette décroissance, il va la chiffrer : « Dans nos pays riches, nous devrions diviser la consommation d’énergie par deux »[20]. Les thèses de Yves Paccalet passent pour être utopiques et non applicables dans l’immédiat. Les hommes ne sont pas prêts au sacrifice nécessaire à la décroissance.
Lire la suite :
[1] Ribotto Roger, L’écologie profonde, Paris, Editions du cygne, 2007, p.11.
[2] Idem, p.13.
[3] Idem, p.37.
[4] Idem, p.49.
[5] Idem, p.77.
[6] Lovelock James, La revanche de Gaïa, trad. fr. T. Piélat, Paris, Flammarion, 2007, p.30.
[7] Idem, p.71.
[8] Idem, p.13.
[9] Idem, p.19.
[10] Idem, p.26.
[11] Idem, p.27.
[12] Idem, p.25.
[13] Idem, p.208.
[14] Idem, p.210.
[15] Idem, p.211.
[16] Paccalet Yves, Sortie de secours, Paris, Arthaud, 2007, p.90.
[17] Idem, p.100.
[18] Idem, p.111.
[19] Idem, p.114.
[20] Idem, p.112.