Inauguration d’une nouvelle rubrique
Coordination : Olivier Ouzilou – Université de Provence ; CEPERC (centre d’épistémologie et d’ergologie comparatives)
A première vue, la connaissance du monde qui nous entoure (social ou autre) est doublement sociale : d’une part, au niveau de son acquisition, en ce que le mode de production et de transmission des croyances et des connaissances est social mais également, d’autre part, en ce que les outils et aptitudes intellectuelles que nous déployons, même de manière autonome et hors de toute interaction ou collaboration, nous ont été, au moins en partie, socialement inculquées.
L’épistémologie sociale s’attache précisément à analyser cette dimension sociale de la connaissance. Elle se distingue en cela, sans toutefois contester sa légimité, de l’épistémologie classique dite « individualiste » qui porte sur les opérations cognitives qu’effectuent des agentsindividuels, abstraction faite de leur dimension sociale, et ce sur trois points : tout d’abord, en thématisant et en évaluant les modes sociaux d’acquisition de croyances et de connaissance (épistémologie sociale dite « interpersonnelle ») ; ensuite, en refusant de se focaliser sur les agents sociaux individuels en prenant, par exemple, pour objet les ensembles sociaux plus larges et ainsi la manière dont ces divers systèmes sociaux(médias, science, etc.) influent sur les croyances individuelles (épistémologie sociale dite « institutionnelle ») ; enfin, en ce qu’elle est susceptible d’intègrer à sa réflexion les entités collectives (comité, parti, gouvernement, etc.) à propos desquelles elle peut se demander si, et jusqu’à quel point, elles constituent en tant que telles des « agents épistémiques » (épistémologie sociale dite « collective »). Elle se distingue également, là encore sans naturellement s’opposer à elle, de la sociologie cognitive, qui vise à décrire les processus sociocognitifs, par sa dimension essentiellement normative : l’épistémologie sociale s’intéressera, exemples parmi d’autres, à la question de la justification épistémique des croyances obtenues par témoignage, au problème de l’attitude mentale la plus rationnelle à adopter lorsque nous sommes confrontés à un désaccord entre des individus légitimement dotés des mêmes compétences épistémiques, etc.