La pornographie porte-t-elle atteinte à la dignité des femmes?
Comme la prostitution, la pornographie érige le corps, la sexualité et l’identité en un problème de justice. Les conditions de travail des actrices pornographiques semblent à peine moins difficiles que celles des prostituées et la pornographie reprend l’idée selon laquelle le corps féminin peut être consommé comme une marchandise. La pornographie existe sous forme littéraire depuis l’Antiquité mais elle est restée durant des siècles un phénomène réservé à une élite ou à une marge contestataire. Elle connaît par contre une forte expansion au 20ième siècle où elle devient un produit de consommation de masse[1] même si elle est encore interdite dans certains pays. La progression des idéaux démocratiques favorisent -sans l’expliquer- cette massification puisque la neutralité de l’Etat en matière de conception du bien -y compris sur le plan sexuel- protège la production et la diffusion pornographique de même que la liberté d’expression[2] et la liberté d’entreprise.
L’invalidité des arguments conservateurs contre la pornographie
La pornographie ne fait pas pour autant l’objet d’une acceptation définitive y compris dans les sociétés démocratiques. On reproche à la pornographie de constituer une menace pour l’individu consommateur, pour les enfants qui y seraient exposés, et plus généralement envers la famille et les institutions. Ces arguments en faveur de l’interdiction de la pornographie peuvent être qualifiés de communautariens[3] en ce qu’ils font valoir que la pornographie heurte une conception du bien en matière de sexualité supposée commune ou jugée souhaitable. Ils ont peu de chance d’aboutir dans les sociétés démocratiques où la distinction de la morale et du droit semble consommée et où domine la pluralité des conceptions morales et des sexualités. Seule l’invocation du tort objectif fait à autrui peut rendre légitime la limitation de la liberté d’un individu au nom de la préservation de celle d’un autre.
Mais il est difficile d’établir médicalement la nocivité de la pornographie et sa dimension additive, de sorte qu’il est difficile d’en interdire une consommation abusive. De même, lorsqu’on érige la pornographie en une menace pour les institutions sociales et notamment la famille, on est obligé de faire référence à une certaine conception de la famille ou de l’amour, centrée sur le cadre conjugal et la finalité procréative de la sexualité. Or, un Etat démocratique ne peut appuyer l’hégémonie d’un mode de vie. En outre, s’il est vrai que dans nos sociétés, le matériel pornographique est de plus en plus facilement accessible aux enfants et aux jeunes, on peut considérer que c’est aux parents et non à l’Etat de définir les moyens par lesquels leurs enfants découvrent la sexualité[4]. On peut préférer vivre dans une société où les enfants apprennent que les rapports sexuels gagnent à s’inscrire dans des projets durables, mais il s’agit d’une préférence morale qui ne peut déterminer l’Etat à sortir de sa neutralité.
La position conservatrive ou prohibitionniste en matière de pornographie n’est pas non plus justifiable du point de vue de la demande d’égalité entre les hommes et les femmes. Elle repose en effet sur une morale traditionnelle qui est elle-même défavorable à l’égalité des sexes. Lorsque des communautariens réclament l’interdiction de la pornographie, c’est parce qu’elle véhicule une sexualité supposée dégradante -c’es-à-dire en contradiction avec certaines valeurs socialement admises, et non pas « contraire à l’égalité entre les hommes et les femmes ». Or, parmi ces valeurs communes, on retrouve la structuration générique des rôles sociaux voire la représentation patriarcale de la famille. En voulant interdire la pornographie parce que la promotion de la sexualité débridée et de la marchandisation du corps nuit à l’institution familiale et à la vocation reproductive de la sexualité féminine, on ne fait qu’opposer une morale dominante masculine à une autre morale masculine.
L’argumentation féministe contre la pornographie
Pour obtenir une audience légitime, une argumentation contre la pornographie doit reposer sur la logique des droits individuels et de l’égalité[5]. Comme dans l’abolitionnisme féministe en matière de prostitution, on retrouve la mise en concurrence de deux droits opposés entre lesquels il faut arbitrer : le fait ne de pas être discriminé en raison de son sexe joue un rôle plus important dans la vie d’un individu que le fait de pouvoir consommer de la pornographie.L’interdiction de la pornographie devient alors compatible avec les valeurs d’une société démocratique, comme l’autonomie individuelle, le principe de non-discrimination, la libre disposition de son corps et la garantie du respect de soi.
Certaines études[6] prétendent pouvoir établir empiriquement lien de causalité entre la consommation de pornographie et la violence sexuelle. La diffusion de la pornographie exposerait le corps des femmes à un taux supérieur de violences et diminuerait leur sécurité, leur intégrité et leur liberté de mouvement. L’univers pornographique sexualise le refus féminin, il fait du refus féminin une condition de l’accomplissement du désir masculin, il fait donc la promotion de l’acte sexuel forcé. Il serait donc injuste qu’un Etat démocratique protège la liberté de consommer de la pornographie plutôt que celle de ne pas voir son corps être menacé par des violences physiques.
L’argumentation abolitionniste exploite aussi et surtout la notion de tort symbolique : l’existence même de la pornographie porte atteinte à la dignité des femmes. La pornographie met à la disposition des hommes un certain nombre de représentations qui, une fois intériorisées, auront une influence sur leur attitude vis-à-vis à des femmes. Les obstacles objectifs que les femmes rencontrent dans la sphère domestique ou sur le marché du travail trouvent à s’expliquer, au moins en partie, par les obstacles subjectifs ou symboliques que la pornographie distille. Les œuvres pornographiques transmettent de façon systématique l’idée que les femmes sont des esclaves de la sexualité masculine, voire des êtres avides de sexe et de soumission, dénués de subjectivité et d’autonomie. Ce mécanisme contribue à faire de l’inégalité et de la domination des objets de l’excitation sexuelle en même temps qu’il dénie aux femmes toute autonomie et toute dignité[7]. La pornographie adresse aux femmes un impératif de subordination et d’auto-négation comme sujet libre et maître de son discours. Les femmes exposées à du matériel pornographique constatent qu’elles y sont représentées comme disponibles et soumises, ou encore que le corps féminin y est désarticulé par la focalisation sur certaines parties. Et comme la reconnaissance de son propre corps est décisive dans la reconnaissance de soi, on comprend en quoi l’univers pornographique blesse l’identité des femmes et les inclinent à la dévalorisation de soi. Il apparaît alors légitime d’exiger de l’Etat qu’il fasse en sorte que les femmes qui ne veulent pas être confrontées à certaines images qui les représentent puissent ne pas l’être. En pratique, cela pourrait revenir à interdire la pornographie[8].
Les limites de la position abolitionniste en matière de pornographie
C’est au nom de l’égalité des droits et non à partir d’une conception du bien que le féminisme abolitionniste en matière de pornographie situe son argumentation. Si on ne doit pas la réduire à une nouvelle forme de conservatisme moral, cette argumentation pose cependant un certain nombre de problèmes.
Il y a d’abord une difficulté à établir la responsabilité d’une représentation fictive – la pornographie – dans un tort objectif – les violences sexuelles. A ce titre, il n’y a pas de preuves suffisantes d’un lien entre la pornographie et les violences sexuelles ou l’augmentation de la misogynie[9]. L’interdiction doit toujours être l’ultima ratio d’une société démocratique parce qu’elle est en tension avec la neutralité de la loi face aux comportements des individus. On devrait chercher à faire baisser autrement les violences sexuelles que par la répression de causes éventuelles qui, par elles-mêmes, ne sont responsables d’aucun tort objectif.
Le lien entre la violence sexuelle et la pornographie ne peut être établi qu’au niveau des effets directs sur les conditions de travail des actrices. De nombreux témoignages présentent la pornographie comme un monde de misère et de brutalité[10]. Mais les violences exercées sur les actrices de films pornographiques et plus généralement l’exploitation qu’il est fait de leur corps et de leur image constituent-elles une condition inévitable de toute production pornographique? Il est évident que la pornographie contrainte n’est pas plus justifiable que la prostitution contrainte et les maltraitances qui accompagnent le trafic d’êtres humains. Par contre, pour en tirer argument en faveur d’une interdiction, il faudrait supposer que toute participation à un tournage pornographique s’effectue sous la contrainte. Il est vrai que les actrices sont souvent issues de milieux sociaux défavorisés ou de pays pauvres[11] ce qui les placent de facto en position de faiblesse et de dépendance et rend formel leur consententement. On ne peut pas exclure la possibilité d’une participation consentie aux tournages. Il arrive qu’une actrice puisse choisir ses rôles en fonction de critères rationnels et individuels. Cela pourrait peut-être constituer un bon critère pour déterminer si une femme dispose de son propre corps lorsqu’elle participe à un film pornographique. Le gain d’une forte somme d’argent ou la volonté de célébrité par exemple ne sont pas des motifs moins probables pour expliquer la participation à des films pornographiques que l’intériorisation de l’idéologie masculine de marchandisation du corps féminin[12]. On peut surtout envisager de donner aux actrices des moyens légaux pour faire leur métier dans de meilleures conditions[13] à travers des structures syndicales, des négociations collectives, un encadrement médical, et un contrôle par une inspection du travail.
Parallèlement, on peut constater que l’abolitionnisme féministe en matière de pornographie parvient tout aussi difficilement à établir empiriquement un lien de causalité entre pornographie et sexisme. La pornographie est peut-être un facteur parmi d’autres de l’inégalité entre les hommes et les femmes mais elle l’exprime plus qu’elle ne l’explique. En se focalisant sur elle, on se détourne d’autres facteurs sociaux de discrimination plus objectifs. On peut supposer qu’une augmentation du pouvoir socio-économique de la reconnaissance sociale des femmes, c’est-à-dire un progrès de l’égalité réelle, rendrait aussi les inégalités moins sensibles dans la sphère des représentations.
L’omniprésence de l’univers pornographique tient sans doute au monopole masculin de la définition des normes culturelles.C’est pourquoi la position féministe bien comprise en matière de pornographie devrait consister à encourager l’émergence de formes alternatives à la pornographie dominante. Elles seraient susceptibles de faire triompher une conception plus égalitaire de la sexualité sans avoir besoin d’interdire la pornographie. En ce sens, d’autres féministes[14] plaident pour la production d’une pornographie féministe qui renverse les rapports de pouvoir et de domination présents dans la pornographie masculine. Dans cette perspective, on peut concevoir la pornographie comme un moyen possible d’informer l’individu en mettant à sa disposition des modes de recherche de la vie heureuse sur le plan de la sexualité. C’est en ce sens que la pornographie n’est pas incompatible avec la liberté d’expression puisqu’une personne doit pouvoir choisir sa sexualité en connaissance de cause. Il serait contradictoire que l’Etat autorise toujours davantage une libéralisation des pratiques sexuelles, et donc une diversification, tout en refusant à cette diversité de s’exprimer et de se diffuser.
L’injustice de la pornographie ne tient pas au message qu’elle véhicule mais au fait qu’elle est emblématique d’une hégémonie masculine. Plutôt que d’interdire la pornographie, il vaut mieux souhaiter que la pornographie dominante représentant le corps féminin comme objet soumis au désir masculin soit mise en concurrence avec d’autres formes de représentations pornographiques, où la sexualité féminine peut s’exprimer[15]. Un Etat démocratique doit protéger l’expression des cultures minoritaires, et en l’occurrence des conceptions de la sexualité alternatives à celle qui est véhiculée par la pornographie dominante[16].
Enfin, la censure ne ferait qu’entraîner un marché noir plus radical encore puisque la censure interdit la dissémination d’un discours mais ne fait pas disparaître sa pertinence apparente. L’interdiction risque de le rendre plus attractif en lui donnant l’occasion de circuler sous une nouvelle forme, plus piquante et toujours plus compatible avec son présupposé de dénégation du refus : la répression supposée de la sexualité devient la sexualisation de la répression [17]. Il vaut mieux combattre les effets potentiels de la pornographie dominante par le pluralisme culturel et l’éducation à une approche réfléchie et autonome des conceptions du bien.
Une conclusion différente en matière de prostitution et de pornographie
On pourrait s’étonner que la position abolitionniste défendue dans l’article précédent en matière de prostitution ne soit pas prolongée en ce qui concerne la pornographie. Il est vrai que les réseaux de traite des femmes alimentent autant l’industrie pornographique que l’offre prostitutionnelle. Mais la position abolitionniste en matière de prostitution engage justement une lutte radicale contre ces réseaux, l’interdiction de la prostitution entraînant aussi la diminution de la pornographie contrainte. S’il n’y a pas de différence entre la prostitution et la pornographie contraintes, c’est plutôt la différence entre le degré de probabilité de l’existence d’une prostitution consentie et celle d’une pornographie consentie qui justifie l’abolition dans un cas, la réglementation dans l’autre.
La production pornographique ne se définit pas par la clandestinité qui est caractéristique de la prostitution. La production pornographique a vocation à être diffusée et laisse par définition davantage de preuves matérielles, ce qui facilite des poursuites judiciaires éventuelles. De plus, il semble qu’un encadrement légal et social de la profession puisse se mettre en place plus facilement, comme en témoigne déjà l’existence de certaines structures d’encadrement[18]. L’univers pornographique ne constitue pas non plus un « monde sans issue » [19]identique à celui qui caractérise l’univers prostitutionnel. Les actrices de films pornographiques subissent moins d’effets de stigmatisation et de ghettoïsation que les prostituées. Le métier d’actrice de film X peut même entraîner une certaine reconnaissance sociale lorsqu’il conduit à la célébrité ou offre une passerelle pour le cinéma dit ordinaire.
Si une interdiction de la pornographie semble incompatible avec les prémisses libéraux des sociétés démocratiques, cela ne doit pas empêcher une réflexion sur les moyens de rendre la production et la consommation de pornographie plus compatibles avec ces prémisses. Il faudrait qu’en matière de sexualité et de conception du bien, l’Etat prenne la mesure de son rôle de régulation en encadrant, comme il le fait en matière économique, le libre marché et en encourageant l’expression de la diversité.
Matthieu Lahure
[1] Le budget mondial de la pornographie est estimé à plus de 60 milliards de dollars. Aux USA, les hommes dépensent davantage d’argent en moyenne par an pour les divertissements pornographiques que pour toutes les autres formes de divertissements de spectacle. En Allemagne, deux tiers des hommes ont une consommation au moins épisodique de pornographie (revues ou films). Sur Internet, on dénombre plus de 50 000 sites pornographiques, soit plus de15 millions de pages, enfin, la pornographie représente 35 % du volume total de fichiers échangés[1] Voir POULIN R., « Quinze thèses sur la prostitution mondiale », in Prostitution, la mondialisation incarnée, p 11.
[2] Cela ne signifie pas que l’ensemble de la production pornographique possède une valeur artistique, mais on ne doit pas exclure non plus que certains films à caractère pornographique possèdent une valeur artistique. Inversement, l’interdiction de la pornographie pourrait entraîner la censure des films de valeur artistique comportant des scènes pornographiques. Quant aux effets de ces créations artistiques pornographiques sur le public, ils posent un problème de protection du public mineur qui n’est pas spécifique à la pornographie.
[3] Voir par exemple la discussion des thèses de M. Sandel en matière de pornographie dans KYMLICKA W., Les théories de la justice, Chapitre 5, pp 248-249.
[4] L’Etat doit néanmoins s’assurer que lorsqu’un enfant a accès à du matériel pornographique c’est toujours avec l’accord réfléchi d’un adulte, et sans lien avec des pratiques pédophiles.
[5] Voir MAC KINNON C., Only words, A concise, powerful attack on pornography as the embodiment of violence against women. In harm’s way : the pornography civil rights hearings. DWORKIN A. Pornography : Men possessing Women.
[6] Voir par exemple RUSSEL D., Making Violence Sexy ; Feminist Views on Pornography, p 123..
[7] Le discours des femmes dans l’univers pornographique est toujours antiphrastique: lorsque une femme dit « non », elle pense « oui ». La pornographie fait perdre au discours féminin toute force illocutoire: la femme se voit dénier le pouvoir de dire non en pensant non. En résistant au désir masculin, le discours féminin le confirme et s’annule comme discours porté par une subjectivité autonome.
[8] Certaines féministes ont proposé des moyens de limitation des effets de la pornographie moins susceptibles de se voir reprocher une politique de censure. Il s’agit d’un système de zonage qui limite l’exposition de la pornographie pour protéger ceux qui ne souhaitent pas y être exposés. Mais comme pour la prostitution, le zonage risque d’entraîner la ghettoïsation de la production et de la consommation, renforçant la stigmatisation mais aussi l’impunité. En outre, il n’est pas certain que le zonage diminue le sentiment de dégradation qui pourrait naître de l’existence même de la pornographie. Voir CORNELL D., The Imaginary Domain. Abortion, Pornography and Sexual Harassment, pp 103-105.
[9] Lle nombre de viols est parfois plus faible dans des région où la permissivité pornographique est forte. Voir Campagna , Chapitre 3, pp 202-210. De plus, si on interdit la pornographie sous prétexte qu’elle prédispose une extrême minorité au viol, on déresponsabilise le violeur en imputant à la pornographie la responsabilité du crime. Un violeur pourrait demander les circonstances atténuantes en faisant valoir que c’est sous l’influence de la pornographie qu’il a commis son acte..
[10] Voir CAMPAGNA N., La pornographie, l’éthique et le droit, Chapitre 2, pp 90-93.
[11] On retrouve les mêmes pays que pour la prostitution : Pays de l’Est, Afrique, Asie du Sud-Est. Voir POULIN R., « Quinze thèses sur la prostitution mondiale », in Prostitution, la mondialisation incarnée, pp 7-27.
[12] En soupçonnant que tout rapport hétérosexuel est l’appropriation violente du corps féminin par un mâle aux pulsions de domination, K. Mac Kinnon et A. Dworkin donnent l’impression de vouloir interdire la pornographie parce que celles-ci donnent l’occasion à des rapports hétérosexuels et que ceux-ci sont supposés nécessairement oppressifs pour les femmes. Il n’existe pas pour Mac Kinnon de participation consentie des actrices à la production pornographique parce qu’elle suppose qu’il n’existe pas, du point de vue des femmes, de sexualité hétérosexuelle consentie.
[13] Voir CORNELL D., The Imaginary Domain. Abortion, Pornography and Sexual Harassment, pp 96-102. Certes, il est vrai qu’en améliorant les conditions de travail dans les pays occidentaux, on risque aussi de voir se multiplier les délocalisations de la production pornographique dans des pays pauvres où les actrices sont en position plus fragile. Mais au contraire de l’interdiction, la limitation de la diffusion pornographique pourrait justement consister à interdire l’importation et la possession de films provenant de pays où les actrices sont exploitées. Une institution indépendante pourrait à cette fin délivrer un label selon des critères précis établis par une commission intégrant des actrices. Les professionnels de la production pornographique ont également intérêt à la mise en place de procédures d’auto-réglementation qui sont les plus à même de les prémunir de toute interdiction. Par exemple, l’’AFAA (Adult Film Association of America) est une association de professionnels de la pornographie qui regroupe 200 producteurs qui se sont engagés à respecter un ensemble de règles déontologiques.. Voir CAMPAGNA N., La pornographie, l’éthique et le droit, Chapitre 4, pp 305-307.
[14] Voir notamment CORNELL D., The Imaginary Domain. Abortion, Pornography and Sexual Harassment. Voir aussi STROSSEN N., Defending Pornography. Free Speech, Sex, and the Fight for Women’s Right.
[15] Il est vrai que l’érotisme féminin ne se reconnaît souvent pas dans l’univers pornographique préférant le relationnel, l’affectif, l’implicite ou le suggéré. Mais on pourrait aussi supposer que ce désintérêt des femmes pour la pornographie se limite à un désintérêt pour la pornographie dominante, centrée sur la jouissance phallique, cela n’implique pas que le désir féminin ne puisse faire l’objet d’aucune stimulation cinématographique et qu’aucune forme de représentation ne puisse être accueillante à l’érotisme féminin. Voir STROSSEN N., Defending Pornography. Free Speech, Sex, and the Fight for Women’s Right.
[16] Le principe de la diversité culturelle protégée par l’Etat peut être appliqué à la pornographie dans des termes proches du libéralisme multiculturel de W. Kymlicka. En effet, le problème de la pornographie n’est pas qu’elle est l’objet d’un cadre trop permissif mais qu’elle n’est pas assez libérale au sens où elle n’exprime pas la concurrence des cultures, en l’occurrence la diversité des conceptions de la sexualité. Pour Kymlicka, ce que traduit le règne de la pornographie dominante sur les représentations du corps féminin, c’est qu’on ne parvient pas à donner aux femmes « la possibilité de rejeter la conception masculine de la sexualité et de définir leur propre sexualité ». Comme dans le cas de l’oppression de la culture dominante, « on ne donne pas au groupe marginalisé la possibilité de faire entendre sa voix ». L’Etat devrait non pas interdire la pornographie, mais lutter, comme dans les autres sphères de la société, contre les situations de monopole. Voir KYMLICKA W, Les théories de la justice, Chapitre 5, pp 248-250 et 276-277.
[17] BUTLER J., « Une politique du performatif » in COLLIN F., DEUTSHER P., Repenser le politique, l’apport du féminisme, pp 256-272.
[18] Voir CAMPAGNA N., La pornographie, l’éthique et le droit, Chapitre 2, pp 109-119.
[19] Voir l’article précédent.